Je venais tout juste de sortir de l'infirmerie, où j'étais restée une ou deux nuits, et j'me trouvais à présent dans le couloir du dortoir des filles. Ce samedi matin même, le Directeur était venu m'expliquer tout ce que j'avais besoin de savoir, et j'n'étais pas sûre d'avoir tout retenu. J'ai une déesse dans la tête ? Ah, ok. Elle pourrait essayer de me tuer ? Génial. J'n'ai plus rien à voir avec les étudiants normaux d'ici ? M'en fou. J'vais devoir avoir une coloc ? Dur... Bon, tout ça pour dire, qu'après avoir eu la tête atomisée d'infos, j'ai un peu les idées embrouillées. Si bien que... J'me rappelle plus du nombre de ma chambre. Faut dire, qu'avec tout ce que j'ai appris, j'avoue ne pas avoir retenue un truc si "ordinaire". 109 ? Non, je le sens pas... Alors 104 ? P'tet bien... mais nan. Oh et puis, merde. J'm'en souviens vraiment plus. Je me rappelle d'une chose, quand même, c'est que le nom de ma coloc' est Alix Letal. A quoi elle ressemble ? Aucune idée.

Je grogne en fermant les yeux tout en me massant les tempes, espérant étouffer la douleur naissante. Depuis que je me suis réveillée dans l'infirmerie, je sens mon crâne comme "oppressé" dans un début de migraine. La faute a la divinité dans ma tête cette douleur ou quoi ?

- Eh, oh, jeune fille, la divinité dans ta tête, elle a un nom !

Je jure tout bas. J'n'arriverais jamais à m'habituer à ça.

- Il va pourtant falloir.

Je soupire et essaye de prendre sur moi. Elle a raison. Il faut que je me fasse à l'idée, tout de suite. Et puis, j'imagine que ça doit pas être drôle d'être en désaccord avec une voix dans votre tête qui risque de vous accompagner toute une vie. Ma déesse ne dit rien, mais je sens une vague de satisfaction qui vient, j'en suis sûre, d'elle. Je souris presque à cette réaction. Bon, s'il faut que je m'entende bien avec elle, autant commencer tout de suite. Je ne sais pas trop comment dialoguer avec elle, mais j'imagine qu'il faut juste penser...

- Euh... Brigid, je l'appelais ainsi pour lui montrer que je faisais un effort. Est-ce que tu te rappellerais du nombre de ma chambre, toi ?

- Eh bien..., elle semblait un peu gênée. Je n'ai rien pu retenir, car tes pensées étaient tellement nombreuses et désordonnées qu'elle m'assaillait de partout, donc, à vrai dire, je suis encore plus perdue que toi.

Aïe, ça commence bien.

- Désolée pour ça.

- Ne t'excuse pas, c'est normal. Il n'empêche, reprit-elle, je suis d'avis de rentrer dans la 109, c'est celle dont tu t'es souvenue en premier, c'est peut-être un signe ?

Eh bien, elle n'avait peut-être pas tort. Et puis, j'n'avais plus rien à perdre, alors, autant y aller. La chambre 109 est juste sure ma gauche et je me dirige vers celle-ci à petits pas, priant silencieusement pour que ce soit la bonne chambre. J'abaisse lentement la poignée et pousse la porte presque en grand, n'entrant pas dans la chambre pour autant, et voit assez rapidement une blonde. Est-ce ma coloc ? Autant lui demander franchement.

- Euh... Est-ce que tu es Alix Letal ?, lui dis-je en penchant légèrement la tête sur le côté.

Je sentais la lumière du matin sur mon visage alors que je m’entêtais à garder les yeux fermer. J’étais prête à parier qu’il était encore trop tôt pour se réveiller, surtout avec la dérouillée que je m’étais prise la veille. Je risquais tout de même un coup d’œil à mon téléphone histoire de savoir l’heure exacte… 8h30… Je remontais la couverture sur mon visage et me rendormais, espérant que la gueule de bois passe plus facilement ainsi.

J’avais été à nouveau réveillée par les vas et vient de ma si charmante colocataire, Calypso. En effet, je ne sais pas si qu’il lui avait pris ce matin mais elle avait décidé que c’était journée porte ouverte dans notre chambre. Je ronchonnais tout en m’asseyant sur le lit, lançant un regard meurtrier à la porte qui se refermait pour une énième fois.

Elle se venge peut-être du raffut que tu as fait hier soir en rentrant de soirée.
J’ai été discrète !
…Comme un éléphant.

Je poussais un soupire tout en me penchant au bord du lit, attrapant une bouteille d’eau qui trainait au pied. Je bu une grande gorgée que je recrachais aussi rapidement que je l’avais avalée, manquant de vomir au passage.

« Merde quoi ! »

Je m’essuyais la bouche avec le bas de mon t-shirt. En effet, c’était tout sauf de l’eau dans la bouteille. Le liquide avait beau être transparent, vu le gout et l’odeur c’était de la tequila pure et dure.
Je fronçais les sourcils tentant de me rappeler quand je m’étais mise à la tequila la nuit passée, mais tout ce que j’eu comme réponse fut un mal de crâne plus fort. Je me relevais et allait chercher de quoi nettoyer le sol ou jonchais l’alcool que j’avais recraché. Je me dirigeais ensuite vers la salle de bain, prenant une douche longue et bouillante. Je chantonnais doucement tout en laissant couler l’eau chaude sur ma peau, espérant qu’elle ravive ma mémoire.
Je ressortais de la douche, rouge comme une écrevisse. Tous les miroirs et fenêtres était recouverts de buée. Je dessinais deux trois idioties dessus avant de sortir de la salle de bain. Je profitais que ma camarade ne soit pas là pour mettre la musique dans la pièce. Les notes d’Immigrant Song se mire à résonner dans la pièce alors que j’enfilais un jeans gris et un caraco rouge. Je séchais rapidement mes cheveux à l’aide de ma serviette, décidant de les laisser sécher à l’air libre pour une fois.

Je repris mon téléphone, regardant si j’avais pris des photos de la soirée. Je savais que j’étais sorti avec des élèves de l’université mais je ne me souvenais pas de grand-chose. Une chance était que je n’en avais ramené aucun dans mon lit, Caly aurait fait une syncope. Cette idée me fit sourire et je me dis que je devrai tenter l’expérience un jour, j’étais certaine que sa tête en vaudrai la chandelle.

Remarque que si  tu as fait quelque chose de mémorable hier soir tu seras rapidement au courant. Les rumeurs vont vite.

J’haussais les épaules, Hadès avait raison. J’avais beau être une sacré fêtarde, je ne faisais, en général, rien de trop extravagant. Enfin rien que je n’aurai pas fait dans d’autre condition.

J’entendu le bruit de la porte de ma chambre et me retournais, prête à incendier ma colocataire. Elle allait se décider oui ?! C’était soit dedans soit dehors, mais pas les deux quoi ! Je fus donc surprise de me retrouver face… à une jeune fille ? qui me demanda si je me prénommais Alix.
Je détaillais ma camarade de la tête au pied. Son look n’était pas du tout féminin et elle avait l’air un peu paumée. Pas physiquement parlant, mais elle devait être nouvelle chez les M, je ne l’avais encore jamais vue. Elle avait un joli visage et semblait gentille.

« Hey ! Non désolée je ne suis pas Alix… Me s’emble qu’elle est en chambre 104. Moi c’est Aislinn, enchantée de te connaitre quand même ! »

Je lui fis un grand sourire tout en lui tendant une main amicale.

« Tu es nouvelle parmi les M ? Je n’ai pu m’empêcher de repérer ton air un peu perdu. Je comprends… c’est déboussolant au début… et même pas la suite mais on s’y fait ne t’en fait pas ! »

Je lâchais un petit rire cristallin tout en m’éloignant un peu d’elle, histoire de lui rendre son espace vitale.

« Si tu as besoin d’aide ou autre tu n’hésites pas, maintenant tu sais où est ma chambre ! Mais si tu veux rester discuter un peu, t’es la bienvenue. J’ai deux trois trucs à grignoté. Sinon je t’accompagne à ta chambre ! »

Avant même qu'elle me réponde, j'ai compris que je m'étais trompé, elle paraissait trop surprise de tomber sur moi. Je suis sûre qu'on avait prévenu mon arrivée à ma nouvelle coloc. J'commençais à espérer que cette blonde aux cheveux humide et vêtue simplement pourrait m'aider lorsqu'elle prit la parole.

« Hey ! Non désolée je ne suis pas Alix… Me s’emble qu’elle est en chambre 104. Moi c’est Aislinn, enchantée de te connaitre quand même ! »

104... Ow, funny.

- Brigid, tu t'es trompée.

- Chut.

- Salut, merci de l'info, dis-je en lui serrant la main qu'elle m'avait tendue entre-temps. Gwen pour ma part, ravie.

Je ne souris pas et je n'avais certainement pas le ton enjoué qu'elle avait, mais je ne paressais pas pour autant rigide. Elle me posa rapidement une autre question, suivi par un rire et une invitation à rester grignoter, auxquelles je répondis en m'appuyant nonchalamment contre le cadre de la porte. J'avais la tête qui tournait légèrement, en fait. À cause du sentiment de tornade que m'inspirait Aislinn avec son flot de paroles et de son côté vivifiant ou bien à cause de mon mal de tête ? Un mélange des deux peut-être.

- Effectivement. Je suis arrivée il y a un peu plus d'une semaine et ça fait à peine deux jours que... je me suis fait posséder ?, la fin de ma phrase sonnait comme une question, car je n'étais pas sûre du terme à employer. J'espère bien que je vais finir par m'y faire, toute une vie avec une voix dans ta tête avec qui t'as du mal, c'est pas mon tripe. Mon sourire n'était pas visuel, mais vous pourrez peut-être l'entendre dans mon timbre de voix. Si c'n'est pas le cas, j'ne sais pas comment vous risquerez de prendre mes paroles. Espérons que cette blonde ne le prenne pas mal, au contraire de la majorité.

- Tu crois que ce serait plus drôle pour moi peut-être ?, m'accusa Brigid en référence à ma phrase précédente.

- À toi de me le dire.

Je n'eus pas de réponse. Je repris donc la conversation.

- C'est sympa de me proposer de l'aide, j'imagine que tu dois être habituée au pensionnat et tout ce qui va avec ? J'allais continuer de parler lorsque je fus interrompu par un gargouillement de mon ventre assez sonore, que mon interlocutrice avait sans doute entendu elle aussi. En ce qui concerne rester grignoter, j'allais refuser... Mais je crois que je vais rester finalement, dis-je en fronçant le nez, ce qui courbait légèrement mes lèvres en un sourire. C'était ma façon à moi de le faire, ouais. Ce rictus ne dura que quelques secondes avant de disparaître, ma face redevenant sans émotion.

- Tu pourrais lui dire merci.

- Ma déesse et moi te remercions de ton hospitalité, annonçais-je presque d'un air cérémonieux.

- Ce n'était pas ce que je voulais dire..., marmonna Brigid avec irritation, sachant parfaitement que je me moquais d'elle.

La jeune fille au look masculin me remercia pour les infos que je lui donnais. Je continuais de lui sourire, l’écoutant. Gwen… c’était jolis et facile à retenir, ça lui allait bien je trouvais. Elle m’expliqua qu’elle était à Immortalia depuis peu. Je ne m’étais donc pas trompée. Je souris, légèrement amusée lorsqu’elle employa un ton hésitant en mentionnant la possession. C’est vrai que lors d’une conversation avec des gens normaux c’était le genre de terme qui n’était que peu utilisé… ou pour parler d’un film fantastique.
           
« Tu verras, on se fait assez rapidement à la voix. Des fois, en tout cas pour ma part tu ressens leurs émotions, là c’est  un peu plus dur de faire la part des choses au début… mais ensuite on s’y fait ! …Ou peut-être qu’on perd simplement la tête. Va savoir ! »

J’étais contente qu’elle accepte mon invitation, je lui fis signe d’entrer tout en refermant la porte derrière moi. Je tirai une chaise de l’un des bureaux et lui fit signe de s’assoir. Je me penchais sur le côté de mon lit pour attraper des paquets de biscuits et deux bouteilles de coca.

« Ouvre ce que tu veux, tout sera mangé de toute façon alors fait toi plaisir ! »

Je marquais une pause, ouvrant un paquet de cookie au chocolat noir. Je commençais à en grignoter un avant de reprendre la conversation.

« Oui ça fait un petit moment que je suis là. Pas si longtemps non plus, quelque mois. Mais tu verras on s’y fait vite. Le plus barje dans l’histoire c’est le dirlo… Je pense qu’il a dû être bercé trop près du mur en étant petit si tu vois ce que je veux dire… »

Je bu une gorgée de coca, regardant rapidement l’heure sur mon téléphone posé sur le lit. Il était encore tôt je pourrai profiter de la journée.

« Du coup, j’ai cru comprendre que tu avais hérité d’une déesse. J’ose te demander qui c’est ? Pour ma part j’ai l’honneur immense d’être squattée par Hadès, seigneur des enfers, roi des morts, etc. »

J’avais prononcé cette dernière phrase sur un ton sarcastique. Hadès n’était certes pas trop difficile à vivre mais ce n’était pas non plus une partie de plaisir. Surtout qu’il aimait faire des mystères sur ce dont j’étais, ce que nous étions, capable de faire. Et j’étais certaine qu’il y prenait un malin plaisir.

Si tu oses me dire que je me trompe je mets du métal toute la journée !

Je ne dirais rien… mais je n’en pense pas moins.

« Enfin ! Tu es en quelle classe ? Moi je suis en terminale. Si tu es dans la même que moi on pourra y aller ensemble les premiers temps, enfin surtout pour les cours spéciaux pour les élèves M. J’imagine que tu ne sais pas où sont ces classes-là. »

Je penchais la tête sur le côté, la détaillant un peu plus. Elle était grande, pas difficile en comparaison avec moi, mais en peu plus grande que la moyenne tout de même. Elle était toute pâle, je mettais ça sur le compte de la possession et de la faim. Après tout son ventre avait bien fait entendre qu’elle avait faim non ? Je pouvais voir qu’elle avait aussi pas mal de piercing sur les oreilles. J’aimais bien son style, elle n’aurait pas eu cet accent irlandais que je l’aurai crue sortie de Camden.

« Tu me dis si je parle trop hein, dis-je en souriant. Je ne le prendrai pas mal, j’ai l’habitude je peut-être une vrai pipelette quand je le veux bien. »

Je me levais du lit où je m’étais posée allant à la recherche d’un cachet de Doliprane pour mon mal de tête. J’en trouvais un au fond de mon sac à main. Je distinguais aussi dans la poche intérieure que mon préservatif « de secours » était toujours en place. Ouf ! Au moins une bonne chose. J’avalais rapidement le médicament avant de regarder Gwen.

« Dure soirée »

Je lui fis un clin d’œil entendu avant de reprendre mon interrogatoire.

« Et tu viens d’où ? D’Irlande non ?»

Je grimaçais à sa réponse concernant les différentes façons qu'on avait de s'habituer à la deuxième voix... ou pas. Vraiment, j'préférerais garder ma tête. Brigid ne dit rien, mais je ressentis son amusement. Je vois...
J'entrais dans l'appartement suite à l'invitation d'Aislinn et m'assis sur la chaise qu'elle avait tirée. Je m'adossais totalement à celle-ci, me rendant compte que j'étais pas mal crevée quand même et la tête douloureuse. Je me redressais alors qu'elle mettait sur son lit différents paquets et du coca. Je hochais la tête à sa phrase m'invitant à me servir et je la remerciais alors que je zieutais la nourriture avec convoitise. Voyons voir... Mini-brioches, cookies (qu'elle ouvrit), petits biscuits... Y'avais du choix ! Mais j'optais pour les brioches fourrées aux chocolats, ce qui fit du bien à mon estomac si bien que je n'étais pas loin de soupirer de bien-être. Je prenais une goulée de coca lorsqu'elle reprit la parole, et je faillis m'étouffer au moment où elle parlait du "dirlo" à cause d'un début de rire. J'éloignais la bouteille de mes lèvres, la bouche toujours pleine et je fronçais légèrement les sourcils, avec un regard de reproche en la regardant du genre : "n'essaye pas de me faire rire lorsque je bois". Mes traits se détendirent vite pour redevenir inexpressif lorsque j’acquiesçais d'un mouvement de tête pour lui signifier que je voyais très bien ce qu'elle voulait dire.

- C'était bien l'impression que j'avais eu, merci de confirmer.

Après qu'elle ait regardé son portable et que moi j'entame une deuxième brioche elle me pose une question, et je me force à avaler rapidement ma bouché pour lui répondre :

- Pas sûr que tu connais, ma coloc de tête s'appelle Brigid, déesse de la guérison et de la fertilité - génial, en somme, dis-je ironiquement. Et... excuse-moi mais..., je penchais la tête sur le côté, mes mèches suivant le mouvement, dévoilant mes deux piercings sur mon arcade sourcilière alors que je souriais à ma façon, aurais-tu un penchant pour les défunts et la mort en elle-même pour être tombé sur lui ? M'enfin, je redressais ma tête, mon visage redevenant sérieux, j'suis pas mieux avec Brigid. Je reprenais une bouchée de ma brioche et une gorgée de coca avant de reprendre la parole. Sinon, j'me permets, mais tu t'entends bien avec ta divinité, toi ?

Je posais cette question tout d'abord pour m'informer et avoir des indices peut-être sur comment allait se dérouler la suite des choses pour moi-même et Brigid. Puis aussi pour connaitre la nature du ton moqueur qu'elle avait employé. Celle-ci reprit la parole alors que je trouvais qu'elle avait justement les yeux légèrement troubles, et je m'en demandais la raison...

- C'est parce qu'elle dialoguait avec son dieu.

- Non ? Ca ce voit physiquement comme ça quand on parle ?, je m'exclamais presque.

- Oui, mais avec le temps, ça ne se verra plus. Puis, rajouta-t-elle d'un air amusé, c'est assez discret, tu sais.

J'n'étais pas très convaincu, mais je m'en occuperais plus tard et je répondis à Aislinn.

- Terminale aussi, chance. En une semaine j'ai eu le temps de retenir les salles de classe, mais pas celles des M, ouaip. Merci encore de me proposer ton aide. Ca t'arrive souvent d'être sympa avec les nouveaux comme ça ou j'ai le droit à un traitement de faveur ?, je disais ça sur le ton de la plaisanterie, bien sûr - même s'il y avait toujours un doute avec moi et ma "poker-face".

Je sentis son regard me détailler de partout et je me demandais ce qu'elle pensait de moi. C'est vrai qu'avec mon jean délavé et déchiré aux genoux, ma ceinture à laquelle pendaient plusieurs chaînettes, ma longue chemise noire agrémentée d'une cravate rayé noir et blanc attaché nonchalamment et mes nombreux piercings, j'avais un drôle d'aspect. Mais, j'n'avais pas de problème avec ça, j'm'aimais comme j'étais. Sortant de mes esprits car Aislinn reprenait la parole, demandant si elle ne parlait pas trop, je repris une gorgée de mon coca alors qu'elle se levait pour aller fouiller dans son sac à main, prendre un cachet que je reconnaissais comme un Doliprane qu'elle avala rapidement me faisant un clin d’œil complice m'expliquant la "situation" en deux mots. J'eus un demi-sourire.

- Ah, les gueules de bois, je compatis...

Avant que je ne puisse répondre à sa dernière question elle m'en posa une autre. Je refis mon habituel sourire alors que je répondais enfin.

- J'allais te dire que comparé à ma mère, t'étais bien supportable, mais en fait, t'es p'tet au même niveau... Pour répondre à ton autre question, je repris une gorgée de coca, j'suis en Irlande depuis 7 ans, mais avant j'étais en France, Bretagne plus précisément. Et toi ?, la questionnais-je à mon tour. Tu viens d'où ?

J’étais contente qu’elle soit aussi en Terminale. Ca ferai une allie de plus, enfin je crois. Je ne la
connaissais pas encore vraiment mais aux premiers abords elle avait l’air cool. C’était le genre de
personne avec qui je m’entendais bien.
Cependant, je n’avais pas raison. Moi qui pensais qu’elle était une native de l’île fus surprise
d’apprendre qu’elle n’était ici que depuis 7 ans. Enfin « que » c’était toujours plus que ce que j’étais
resté dans un endroit.

« Haha, alors pour commencer tu auras le droit à ce genre de petit service si on reste un bon terme,dis-je sur le ton de la plaisanterie. Mais pour le peu que je te connais je ne pense pas que nos rapports devraient se détériorer. »

Je piochais à mon tour une brioche dans laquelle je mordais à pleines dents. Mon estomac
commençait à être satisfait, il était gentiment plein.

« Sinon… je viens d’un peu partout. De base, je suis Irlandaise mais à cause du poste de mon père nous avons toujours beaucoup voyagé. Du coup je changeais de ville ou de pays, voir des deux une à plusieurs fois par ans. Le plus longtemps que je suis resté est à Londres pendant les deux dernières années avant d’arriver ici. »

Je marquais une courte pause, l’écran de mon téléphone s’étant allumé pour m’indiquer que j’avais
reçu un message. Je déverrouillais rapidement l’instrument tout en m’excusant auprès de Gwen. Le
texto venait d’un numéro inconnu qui ne me disait pas grand-chose.

Hello ! C’était super hier soir, merci encore. Redis-moi quand tu es dispo pour qu’on se refasse ça ;) 

J’haussais un sourcil interrogateur tout en reposant le téléphone. Je répondrai plus tard. Peut-être
aurais-je une illumination entre deux.

« On dirai que j’ai sûrement fait plus fort que je ne le pensais hier soir… »

« Pour la question que tu m’as posée toute à l’heure sur l’entente que j’ai avec Hadès… »

Ta réponse à intérêt à être positive.

Sinon quoi ?

Tu verras bien…

« Il me fait te dire que tout vas nickel chrome. Enfin… de mon point de vue ça va bien en général. Mais on a les deux notre personnalité et du coup quelque fois, assez souvent, sommes en désaccord. Heureusement pour moi, j’ai le contrôle. Donc tout va bien. Mais il n’est pas horrible et il est même amusant quand il veut. J’aurai pu tomber sur pire je présume. »

Ça ira…

J’en ai rien à cirer, tu le sais ça ?

« Après effectivement je ne sais pas qui est Brigid… enfin je suis une plaie en mythologie, déjà sur mon dieu j’en découvre tous les jours… Mais je connais peu de gens qui s’entende super mal avec leur divinité. »

Je repensais momentanément à Fergal, lui avait eu de la peine avec son dieu… Je balayais le sujet de mon esprit. Ce n’était pas le moment de se déprimer en pensant à des morts.

« Et on a un cours, avec Mr D’Arcy pour apprendre à tout géré du coup ça va… Tu verras ! »

J'avais envie de lui dire qu'elle ne me connaissait pas encore - même pas du tout - mais je me retins. Je n'étais pas obligée d'être sur la défensive. Son comportement me rappelait juste certaines personnes dans mes bahuts, qui, à la première rencontre pensait que j'étais le genre de meuf à faire toutes les conneries possibles, à foutre sa vie en l'air sans pression pour finalement se rendre que j'n'étais pas du tout ça, alors, ils changeaient d'avis comme on change de chemise. Ça m'amusait de voir ça. Allait-il arriver la même chose avec blondinette ? On verra bien...

- Eh bien, nous n'avons plus qu'à espérer, lui répondis-je. Ouais, je devais l'avouer, j'n'y croyais pas trop.

Aislinn reprit à manger, et je me demandais si j'étais encore capable de m'empiffrer... Hum, pas sûr. Je relevais la tête lorsqu'elle reprit la parole. Personnellement, j'n'aurais pas aimé devoir changer d'habitation comme ça. Déjà que le seul déménagement que j'ai eu, ça m'a rendu comme ça - je le regrette pas, vous m'éprenez pas - j'sais pas qu'est-ce que ça aurait donné autrement. Je lui répondis d'un mouvement de la tête.

- J'connais juste la Bretagne et l'Irlande perso'. Je souris, parce que ça me faisait marrer d'avoir en face de moi une fille qui a passé presque toute sa vie à bouger alors que moi j'n'avais presque jamais voyagé. Ça faisait un peu des opposés en fait.

À bien y penser, ce n'était pas loin de la vérité. Elle était blonde, j'étais brune - et encore, j'avais quelques mèches bleus sombres aujourd'hui. Elle avait les yeux clairs, les miens étaient sombres. Elle était petite, j'étais grande. Elle était pleine de vie, c'n'était pas vraiment mon cas. C'était encore plus amusant, pour le coup, si bien que je souris sans m'en rendre compte. Son téléphone vibra et je laissai de côté mes idées bizarres. Je repris une gorgée de coca et je la vis hausser un sourcil. J'éloignais la bouteille de mes lèvres pour parler.

- Un problème ? Je n'étais pas inquiète, juste intéressée.

Ce qu'elle me raconta sur Hadès me fit sourire et je ricanai sur sa "nullité" (il fallait le dire, Hadès est connu) sur sa connaissance de la mythologie, mais je fus quelque peu rassurée de sa réponse concernant l'entente qu'on avait globalement avec sa divinité. Je me demandais l'avis de Brigid concernant la nôtre, justement.

- Alors ?, pensais-je, sachant qu'elle entendait toutes mes pensées, même sans m'adresser à elle.

- Alors quoi ?

- Fait pas l'innocente, grommelais-je. Je soupirais, attendant.

- Eh bien..., je la sentais hésitante. Ça ne fait pas longtemps que nous cohabitons, mais... Je ne suis pas du genre à ne pas m'entendre avec les autres. À partir du moment où tes agissements ne me dérangent pas. Alors, pour le moment, tout va bien.  

Je sentais que sous la douceur, première apparence de Brigid, se cachait une forte déesse qui n'hésiterait pas à prendre possession de mon corps.

- Je ferrais en sorte que ça le reste, alors. Mais ne compte pas sur moi pour être une autre personne que celle que je suis. Entendons-nous bien, Brigid, souriais-je intérieurement.

- Faisons cela, dit-elle presque amusée.

Je redirigeais mon regard sur Aislinn, que j'espérais ne pas avoir fait trop patienter en parlant avec ma déesse.

- Brigid et moi venons de conclure que notre entente est plutôt bonne, pour un début, espérons que ça le reste. Je m'amusais de dire ça. Oh..., dis-je à la suite du nom du nouveau prof qu'elle cita. Je le connais de nom, j'ai entendu des gens - des M, sans doute - en parler. C'n'est pas un drôle je crois ?

Je lançais un sourire amical à Gwen tout en continuant de gringotter ma brioche. C’était bien qu’elle parte du bon pied avec sa divinité. Enfin je pense, après tout chacun son délire, mais de mon point de vue avoir une bonne entente avec la seconde voix dans sa tête était primordiale.

« Tant mieux ! Je ne pense pas que se crêper le chignon à longueur de journée est l’idéal. Et les futures années à venir seront plus paisibles dans ces conditions. »

N’empêche que tu aimes bien chercher la petite bête avec moi…
Tu le cherche toi aussi je te rappelle.

Je marquais une pause repensant à ses paroles sur D’Arcy. C’est vrai qu’aux premiers abords il n’était pas très sympathique. De plus, je n’avais, réellement, eu qu’un cours avec lui il m’était du coup difficile de le juger. Je comprenais cependant l’avis des autres élèves sans pour autant me ranger de leur côté. J’haussais donc les épaules avant de lui répondre.

Ouais surtout qu’il te plait bien sous ses airs sévères.
Mais n’importe quoi, je pense juste qu’il serait mieux un peu décoincé... Et que je serai pas contre de l'aider.
Mmmmh

« Bah… C’est vrai qu’il fait assez iceberg à la première rencontre… Mais pour être franche je ne l’ai pas encore eu assez souvent pour me faire une bonne ou une mauvaise opinion de lui. Il instaure des cours plus ou moins privé pour être à même de nous aider au mieux ce que je trouver bien. Enfin… moi je me retrouve en solo car Hadès n’est compatible avec personne. Ça lui plait bien d’ailleurs. Après D’Arcy dans les grandes lignes… Faut mieux pas arriver à la bourre et encore moins oublier de lever la main… Tu te feras ton idée la semaine prochaine. »

Je glissais mon doigt sur mon téléphone pour faire taire la voix de Robert Plant, la remplaçant pas du Deep Purple. Je retournais ensuite mon attention sur la jeune fille.

« Et sinon, tu es venue ici de ton plein gré ? Oh ! Et si tu as des questions… ou pas… hésites pas j’essaierai de répondre. Après si tu veux rencontrer ta vrai colocataire je comprends aussi. Tu verras, pour ce que je la connais elle est sympa. On était barmaid les deux à la soirée de Pâques.»

J’espérais ne pas l’ennuyer. C’était difficile de déchiffrer ce qu’elle pensait. Ça devait d’ailleurs être une redoutable adversaire au poker. Je notais mentalement de lui proposer une partie un jour.

J'étais du même avis qu'elle concernant la bonne entente nécessaire pour avoir la "belle" vie, même avec une seconde voix. Et puis, j'suis pas suicidaire, alors j'compte bien que ça ce passe du mieux possible. Je lui répondis donc d'un hochement de la tête.

Ça commençait à faire un bout que j'étais assise et je commençais à en ressentir la gêne. Je posais mon coca vide au sol et en profitai pour m'étirer, tirant mes bras au-dessus de ma tête en me cambrant pour me dégourdir le dos par la même occasion puis craqua ma nuque. Je soupirais ; ça faisait du bien... Je m'affalais de nouveau dans ma chaise en allongeant mes jambes quelques secondes. Pour un peu, je me coucherais par terre. Alors que je regardais le plafond, Aislinn ne voyant pas mon visage, j'en profitai pour grimacer légèrement, ma migraine étant de retour. Ça commençait à me gonfler cette histoire, déjà que j'ai une déesse dans le crâne et que je n'avais rien demandé, alors si je me tape une migraine en prime... Sans façon ! Je me redressais en une position plus convenable avec de nouveau mon visage sans émotion alors qu'elle parlait du prof... Elle avait un autre avis que du groupe d'élèves que j'avais entendus parler.

- Un genre de Mme. McGonagall en homme ? Je haussais légèrement les épaules. Je me ferais vite une idée, oui.

- McGonagall ?

Ah, God, elle n'était pas à jour elle, c'est vrai.

- Je lirais Harry Potter bientôt, tu verras.

Brigid semblait dubitative.

Je haussais cette fois-ci un sourcil lorsque Aislinn changea de musique. Pas vraiment mon style... Mais au moins, ce n'était pas ce genre de truc hyper connu et pourtant si nul... Alors, j'étais plutôt satisfaite. Je me penchais de nouveau sur les différents paquets de gâteaux sur le lit, me disant qu'un dernier pour la route, ça me ferait pas de mal... Alors j'optais pour un cookie, comme elle précédemment, pour ne pas trop ouvrir de choses, quand même. Je relevais la tête lorsque blondinette reparla.

- À cause d'un principal à la c*n et de ma mère qui paraissait trop enchantée (je levais les yeux au ciel à cet instant) que je vienne ici, j'me suis forcée à rentrer dans ce pensionnat. Hm..., je fis mine de réfléchir, première question : et toi, de plein gré ou pas ? J'essuyais les miettes que j'avais aux coins de la bouche lentement, en pleine réflexion... Ce serait bien que j'aille voir ma future chambre, vrai. Eh puis, franchement, j'commençais à abuser de son hospitalité, là. Je me levais donc, en mettant mon sac en bandoulière. Serait temps que j'bouge, ouais. T'inquiète, je la stoppais avant qu'elle ne dise quoi que ce soit, j'suis sûre de trouver la chambre 104 toute seule. Je ne disais pas ça sur mon ton habituel, il était un peu plus doux, pour bien lui montrer que je disais ça amicalement.

HRP:

Je souris à la référence d’Harry Potter. Je n’avais pas vu D’arcy sous ce point de vue mais c’est vrai que ça ne lui allait pas trop mal. Il avait juste un côté sexy que la directrice des Griffondors n’avait pas tellement.

Je l’écoutais ensuite m’appendre qu’elle aussi était coincée ici par obligation. Elle n’avait pas l’air enchantée du tout, ça me fit sourire malgré moi.

« Première question : et toi, de plein gré ou pas ? »

J’avais difficilement le morceau que j’avais en bouche pour lui répondre.

« Malheureusement on est deux à être là contre notre gré. Moi c’est mon père qui était ravi de pouvoir se débarrasser de moi. Il n’a pas hésité un instant. J’haussais les épaules. En soit ça ne m’étonne pas venant de lui… M’enfin. Tu verras, ce n’est pas si pénible que ça. »

Je ne savais pas si c’était elle ou si c’était moi que j’essayais de convaincre. Après quelque moi ici ça allait mieux, oui, mais ce n’était pas non plus l’éclate absolue.

Gwen m’annonça qu’elle n’allait pas tarder à partir et qu’elle était capable de trouver sa chambre toute seule cette fois ci. Je lâchais un petit rire avant d’avaler une gorgée de coca. Il faudrai que j’aille en quête de café un peu plus tard.

« Je ne doute pas de ton sens de l’orientation. Et dans le pire des cas, maintenant tu sais où me trouver. »

Je me penchais en avant, attrapant un calepin dans mon sac. Je notais rapidement mon numéro sur une feuille que je déchirais, la tendant à ma camarade.

« Au cas où, si tu veux faire la fête, qu’on aille en cours ensemble ou encore que tu as besoin de discuter. »

Je me relevais, m’époussetant des miettes qui jonchaient ma tenue. Un coup de balayette allait être nécessaire. Je me dirigeais vers la porte d’entrée de la chambre, l’entrouvrant avant de me retourner vers la jeune fille au look masculin.

« Je suis contente de t’avoir rencontré Gwen. »

Je lui fis un sourire tout en me décalant pour la laisser passer. Une fois qu’elle fut partie j’augmentais le volume de la musique, m’allongeant sur mon lit les yeux fermé. Il fallait vraiment que j’arrête les mélanges d’alcool. J’ouvris un œil, attrapant mon téléphone. J’affichais à nouveau le message de l’inconnu.

Eh ouais avec plaisir ! Euh… juste comme ça c’est qui ^^ J’ai que le numéro du coup ça m’éclaire pas…

HRP: