Quelques jours étaient passés depuis l'altercation avec cette fille. Quel était son prénom, déjà ? Oh, je ne sais plus. Et comment dire ? Je m'en moque tant, mais tant. J'étirais un sourire, soupirant, étendant mes jambes le long de mon lit. On était le soir d'Halloween, et je n'avais eu aucune envie de me mêler à la fête. Pourtant j'aime ça. Mais là, je voulais juste profiter de cette sérénité que m'offrait une chambre vide, sans coloc'. Ils avaient dû filer à la fête, je suppose.


Je me questionnais toujours sur cette arrivée si soudaine d'une armée de toutous à la solde de sa Majesté Victoria. Un second soupir alors que je croisais les bras derrière mon cou, nonchalant. Vraiment, était-elle au courant ? Ou bien… ? J'avais permis le doute. Je lui avais octroyé le droit au doute. Je ne savais guère quand j'allais venir lui en parler. Pas maintenant, je suis bien. Posé. Zen. Longtemps que je n'avais pas ressenti cette sensation de « bien-être ». Pour une fois que ce traitement de merde fait autre chose que de me transformer en légume. Tu t'étais bien calmé, toi aussi ? Tu boudes, Muninn ?


« Pourquoi ferais-je la conversation avec toi, pauvre con ? »

Ah non, tu n'avais pas perdu ta langue. Ça me rassurait quelque part. Et m'amusait. Ne pas faire la conversation, toi qui aime tant me couler et me détruire ? Que d'ironie que voilà. Je lâchais un rire franc, souriant, amusé. Je suis tombé bas à ce point, hein ? Je ne saurais dire. Je crois que j'avais tout simplement appris à me faire à tout ça. Oh, j'étais bien trop détendu pour me prendre la tête avec ça et y réfléchir. Je repensais encore à cette séance chez la psy. Qui allait détruire qui… ? Je plissais les yeux, pensif. On verra bien. Je savais déjà la réponse, dans le fond. Autant faire comme si je ne savais rien. Et profiter du peu que je puisse.


« Tu deviens raisonnable ? ~ »

Tu deviens bavard ? Je te renvoie tes piques, tu m'en excuseras. Tu m'as assez habitué à ça, sois-en fier, Muninn. Je me redressais du lit, lorgnant la lune dehors. Une nuit à la belle étoile ? Ouais. Je bougeais, enfilant mes godasses, choppant une bouteille près de mon lit, les roulées du papou. Paré. Je passais une fois de plus par la fenêtre. Parkour quand tu nous tiens. Je m'accrochais comme à mon habitude sur les briques qui ressortaient avant de me permettre quelques petites acrobaties aériennes. Je prenais un appui sur mes jambes, me propulsant vers le rebord du toit que je saisissais d'une main alors que mon autre jambe ramenées contre mon ventre donnait une impulsion me soulevant avant de me faire atterrir sur le toit.


Petit parcours, sans blague, de santé. Je m'installais dès lors sur le rebord du toit, m'allongeant en calant ma tête contre un parpaing, m'allumant calmement une roulée que je me coinçais entre les lèvres, le temps d'ouvrir ma bouteille d'Akevitt. C'était mon Halloween à moi. Face à la lune et ses étoiles, au vent, dans le plus beau des calmes. J'inspirais, apaisé. J'en oubliais tous mes problèmes et tous les désagréments des quelques jours. Vic, ses toutous, mes dérapages. Tout s'évaporait comme la fumée que j'expirais. Je n'en voulais pas tant à Vic sur le fond. J'aimerais juste savoir le vrai du faux. Je ne me sentais pas pour autant prêt à la revoir.


Ce n'est plus si récent, mais j'aimerais être définitivement posé avant de me tâter sur la suicidaire question de revenir vers elle. Avec son Lancelot et sa demoiselle, ça ne serait que plus ardu. Oh, j'aime les défis. Un sourire carnassier pointait sur mes lèvres. J'aime vraiment les défis, oh, vous en savez tant, vous. ~ Je me laissais porter par mes pensées alors que je fermais lentement les yeux après quelques gorgées et une roulée. Le bonheur, tout bonnement. Mon subconscient me dessinait alors encore cette forêt que j'aimais tant en rêve. Oh, je rêve ? Hahahah… Sérieusement ? Je ne pu réprimer un rire surpris. Longtemps que je n'avais pas rêvé.


Et tu n'étais pas là ? Suis-je trop high pour te voir, Muninn ? High et endormi ? Je ne sais pas, ce n'est pas important. J'étais bien, dans ce rêve.

-Dis Auen... Même si tu ne m'entends pas, tu voudrais bien m'écouter, quelques secondes?

Hein ? Cette voix ? Oh, alors finalement même mes rêves te ressassent, Victoria ? J'ignorais ta voix, préférant me perdre dans la contemplation de ce paysage de verdure qui était mien. Je ne le verrais probablement plus, alors… Parle donc, mais je ne t'écoutes pas. Oui, je suis égoïste.


-Je... Je voulais te dire que je suis désolée... Pour tout le mal que j'ai pu te faire... Je sais... Je pense savoir ce que tu ressens, je pense comprendre pourquoi... Pourquoi tout ça est arrivé. J'ai cru bon
de... De rester accrocher alors que tu n'arrêtais pas de me dire de partir, parce qu'au final, tu allais finir par me blesser. Je commence à comprendre, et je me rend compte que j'ai été totalement coquebine sur ce coup-là…

Tes mots… Drôle de rêve. Je ne rêve pas d'excuses de ta part. Là, je ne comprenais pas. Tss, je n'ai pas envie de me réveiller pour savoir si je divague ou si c'est vrai. Pas envie. Je remuais les paupières, préférant t'oublier. Ce n'est qu'un rêve, j'ai bien assez de te voir et t'entendre en vrai, Victoria.


-C'est ma faute si tu autant souffert, parce que j'étais là... Parce que je posais les mauvaises questions, que je ne disais pas les bonnes choses. Je pensais être capable de t'aider mais je ne m'y prenais pas de la bonne manière... Je voulais juste rester ton amie, retrouver comment on était… Avant tout ça…

Ta respiration. Saccadée. Mah, ce n'est pas un rêve alors ? Je m'extirpais de cette forêt que j'aimais tant pour retrouver la sensation froide du vent sur ma peau. Je n'ouvrais pas les yeux, ne bougeant. Je t'écoutais, puisque tu sembles être là, proche de moi, sûrement, à parler.


-Je sais que c'est impossible maintenant... Que tu as toute les raisons du monde de me détester, même si je ne te déteste pas Auen… Je sais que c'est trop tard pour retourner à tout ça, je le sais et je dois avouer que ça me fait bien chier…

Tu ne me le fais pas dire, pourrais-je te dire. Mais tu te trompes lourdement. Je ne peux pas t'haïr, malheureusement. Je n'y arrive pas. J'ai parlé, et je n'ai pas appliqué. Je ne peux vraiment pas, vois m'en désolé, Victoria. Et tu riais, comme dépitée de toi-même. Tu ne vas pas mieux, hein ? Qu'est-ce qui m'arrive, à me préoccuper de toi à nouveau ? Humanité de merde.


-Mais pour autant... J'ai retenu la leçon, et je partirais de ta vie si jamais c'est ce que tu veux... Pour ne pas que les mêmes erreurs se répètent et s'il faut nous séparer, et bien... Je respecterais, tout simplement…

Cesse tes âneries, Vic. Cesses. Je soupirais, peu importe que tu m'entendes ou non. J'esquissais un sourire doux, étrangement. J'avais bien écouté. Et il semblerait que tu avais pigé la leçon. Mais pas tant que ça, puisque tu es là. Mais bon, passons outre. Je ne veux pas me prendre la tête. Et mon quart d'heure d'humanité est bien content de te voir, tu sais… Tss, ça craint.


« Puisque tu es là, restes. A faire croire que tu me suivras toujours, hein ? Tu es une stalkeuse ou bien ? »

Je lâchais un rire amusé accompagné d'un ton amical avant de me redresser, m'allumant une seconde roulée.

« T'as vraiment dû te casser le cul pour un tel discours. Tu vises les présidentielles ? Moi, présidente... »

Je me foutais de toi. Gentiment. J'étais posé, pas de prise de tête. Je n'ai pas la force de te jarter, là. Et comme je l'ai dit, mon humanité t'aimes. Ahlàlàlà… Je te lorgnais, toujours ce même sourire aux lèvres. En sorcière, hein ? Hermione is back ? Je me désespère. J'expirais, taquin.

« Enfin bref, j'accepte tes excuses, Kiki la sorcière. Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu voulais voler en paix ? »

Eh bien alors ? Je lui avais collé le doute, à Vic ? Je gardais un air pincé bien qu'amusé au visage, lorgnant le ciel étoilé. Vraiment, Silas, tes mélanges gèrent. Ce mec allait devenir riche à ce rythme. Vu le nombre d'adeptes qu'il fait à travers tout le pensionnat. J'observais calmement Vic, un regard apaisé. Eh, cesse de stresser ma vieille. Je suis trop posé pour te jeter par dessus bord. Oups, je l'ai dit ? Ahlàlà, je suis pas si cool que ça, hein ? Passons outre, encore une fois. Mais je crois que ce qui m'amusait le plus était bien sa réaction. Il fait peut-être noir, mais avec la lumière de la lune j'arrive tout de même à voir sa gueule d'ahurie d'ici. Je riais encore, moqueur. Oui, ça la choque aussi, que je ris. Ça me choque aussi pas mal, si je devais la rassurer. J'avais bien l'impression de faire un petit retour dans le temps, à ces jours-ci. Oh, qu'ils me manquent ceux-là, mais qu'ai-je dis ? Je passe outre aussi, c'est vrai. Le présent est le présent. Laissons au passé ce qui lui appartient. Mon coeur se serrait un peu. Je soupirais mentalement, agacé de mon humanité à la con. Vraiment, je crois qu'elle t'aime Vic, mais genre beaucoup.


Je me tirais une latte, alors que Vic semblait submergée par les émotions. Calmes-toi, hein, c'est que le soir d'Halloween sur un toit en pleine lune ! Je levais un sourcil, affichant une mine perplexe, bien que toujours amusée sur le coup. Je me sentais con, mais con, d'assister à ça. Elle m'affichait ce genre de sourire que je n'avais pas vu depuis une longue, trèèèès longue éternité. Celui de ces périodes, encore et toujours. Était-elle, elle aussi, coincée dans cette boucle du passé ? On est cons, hein ? Vraiment cons. Pourquoi rêvons-nous encore de ce temps révolu ? Je ne voulais pas paraître pessimiste, mais je vais l'être. Je sais parfaitement que ça ne durera pas. Pas avec moi. C'est stupide, tout ceci. C'est la vie, c'est ainsi. Plutôt que de me lamenter comme ce Dieu inutile que j'eus, autant saisir l'opportunité. Sa respiration se calmait, alors qu'elle rougissait comme une tomate. Eh beh, tu veux qu'on aille te planter parmi les plants de Silas, Vic ? Je gloussais, relevant la tête vers le ciel, détendant mes jambes. Je zieutais ma bouteille à moitié vide, que je décalais sur ma gauche. Ce ciel était magnifique. Finalement cet Halloween, MON Halloween allait être partagé. Déjà que je t'en faisais profiter, Muninn. Voilà que Vic s'y ajoute. Je soupirais comme un con, une moue soulagée au visage.


Son sourire ne la quittait plus, comme collé à son visage avec de la UHU. J'avais l'impression de retrouver cette Victoria, gamine, insouciante, qui partait dans des délires pour un moindre rien. Douce époque révolue que voilà. Il est parfois bon de rêver, non ? Avec toi, je rêve bien souvent. Oh, euphémisme. Je ne rêve pas. Je cauchemarde, je prends, je cris. C'est le train-train quotidien d'un taré, je pense ? Je me fichais bien de ma propre tronche, là. Je suis un sacré cas, et ce seul jour où j'ai l'impression de pouvoir enfin marcher droit, je le sens comme un mensonge. Comme une illusion. Sur laquelle je vais encore m'appuyer et chuter. Et tu me ramasseras encore. Et ça repartira encore. Encore. Encore et toujours.

-Nan, j'ai jamais été très douée dans les longs monologue à t'endormir les insomniaques…

On dirait une enfant, Vic. Comme cette fois-là. Je crois qu'au fond de moi, mon humanité aimera toujours ce souvenir là, même si ce n'est pas le plus évidant.


« C'est déjà pas si mal, tu sais. Rajoute ça à ta passion des Dieux, et c'est bon, tu seras aussi efficace qu'un prozac ! Je ferais appel à tes services, si je dors pas mieux ! »

Lui rétorquais-je, moqueur. Il est vrai que je ne dormais pas mieux.Même de moins en moins. J'avais cette chance de ne pas avoir une tronche de macchabée, tellement mon corps y était habitué. Mais si ses discours sont si efficaces, je vais réserver sur l'heure. Et elle s'offusquait pour ma vanne de Kiki la sorcière. Mais c'est rudement vrai. Manquerait plus que le chat noir, le rire maléfique et je finirais en crapaud. Que je me surprend. A être aussi posé, enfantin. Je ne me reconnais pas. Et ça fait mal, dans le fond. Je sais parfaitement que ce n'est plus moi, ce Auen là. Celui qu'elle semblait tant apprécier, et celui que j'aimais être. Révolu, encore. Elle se redressait alors que je laissais la fumée se faire porter par le vent. Elle pointait son balais sur moi. Un sort ? J'éclatais de rire, me fichant une fois de plus ouvertement de elle. Elle riait à son tour, perdant son air sérieux avant de poser son balais, épis vers le haut.


-Je voulais surtout prendre l'air. La fête en bas est sympa mais on va dire... Que je n'aime pas trop ce genre d'ambiance... Ils vont tous finir sous alcool à la fin de la soirée alors que je resterais de toute façon totalement sobre, je ne veux pas "ruiner l'ambiance" comme ils disent.

Je voyais. Je soupirais, un peu mal pour elle. Humanité de merde, que je te hais. Je me savais parfaitement coupable, en plus. Alors bon…

« Si j'étais venu, j'aurais fait parti de ceux qui s'enfilent toutes les bouteilles. »

Lâchais-je amusé. Je bois comme un trou, j'assume. Mais je suis bien plus sobre que certains, pour ça. Je la voyais qui venait vers moi, s'approchant du rebord pour s'asseoir à mes côtés. Je me sentais… Perturbé ? Mais pourquoi pas ? J'inspirais longuement avant de souffler un large nuage, pivotant sur moi-même pour laisser mes jambes pendre dans le vide.


J'attrapais Vic et la faisait pivoter aussi. A quoi bon parler, si on est de dos ?

-Dis... Je peux goûter?

Huh ? Je soulevais un sourcil, puis affichais clairement une gueule surprise. Pardon ? Vic, goûter ça ? Je riais, franc.

« Si tu veux ! Mais si tu décolles trop, je viendrais te chercher sur ton balais, hein. »

Taquin. J'étais posé. Juste posé. Avec un magnifique clair de lune. Je glissais ma roulée entre les lèvres de Vic, amusé.

« Si tu prétends voir des licornes et autres choses du genre, je ne suis absolument pas coupable ! »

J'étirais mes bras, les posant derrière moi, lorgnant ce ciel. Encore un autre souvenir qui me revenait. Révolu. Oui.

Cette gueule. Cette gueule. Elle m'avait manquée. Je la voyais qui gonflait les joues, boudeuse, avec son sourire de gosse aux lèvres, alors qu'elle me menaçait de son balais. Qu'est-ce-que je disais ? Crapaud disait la fin de la soirée ! J'étirais un sourire enfantin, ne perdant pas les étoiles de vue. Et ça revenait. Une fois de plus. Tous ces souvenirs. Ahlàlàlà… J'aimerais me l'enfoncer clairement dans le crâne que ces temps sont finis. Résolus. Enterrés. Et pourtant, toi, coeur, tu y crois encore. Es-tu con à ce point ? Ou seulement atteint ? Oh, qu'en sais-je ? Pas de questions ce soir. Pas avec une si belle vue. Juste planer. Je fermais les yeux, bien. Juste bien. Je n'avais pas non plus le trip qui ferait que j'allais me prendre pour E.T et voler jusqu'à la lune en vélo, mais j'étais suffisamment posé pour me foutre qu'Immo prenne feu. Oh, c'est déjà le cas en temps normal, pardon. Oh, je l'ai fait aussi. Ah, merde.

-Je me serais occupée de te faire rouler sous les tables, espèce d'alcoolique là! J'suis bien contente en fait de pas pouvoir y toucher, ça évite pas mal de soucis au fond.


Et encore un. Je ne pu m'empêcher de lâcher un petit rire. Oui, heureusement qu'elle n'y a pas touché. Si ces souvenirs révolus sont bon, elle ne tient pas bien l'alcool, Vic. Même très mal. Un verre de Poteen, et elle était HS. Que dis-je ? Un verre ? Une gorgée ! Je continuais de rire, lui rétorquant, enfantin.

« Faut-il que t'arrive à me porter autrement qu'un sac à patate… Oh et puis, s'il m'arrivait d'être bourré, j'aurais roulé tout seul comme un grand, tu sais ? »

Je la taquinais, mais elle aimait ça, alors bon. Légitime. Et elle riait encore. Cette soirée durera-t-elle ainsi ? Je me le demandais bien. Je soupirais, un large sourire aux lèvres, alors que j'attendais que Vic me rende ma roulée. J'allais finir par croire que j'allais devoir lui faire un petit guide. Je ne suis pas non plus un gros fumeur, loin de là. Juste qu'en ce moment, j'en ressens le besoin. Enfin, ces derniers temps, plutôt. Depuis combien de temps, j'ai pris cette manie, de m'en fumer 2-3 par jours ? Oh, que je le savais. Oh que ça faisait mal. Oublions.


Je n'étais pas ici pour me ressasser tout ça une fois de plus. Surtout si mon humanité à la noix est ravie de revoir Vic. Oh, je finirais bien par t'enterrer toi…

« On peut toujours s'arranger ? ♪ »

Tu ne rates pas l'occasion de demander, toi, hein ? Je te sentais qui riait, sarcastique. Pourquoi demander, toi qui me soumet toujours par la force ? Que je te dise oui, ou non, tu n'en feras qu'à ta tête. Je n'ai pas de droits, l'as-tu oublié, Muninn ? Et tu riais, mauvais cette fois. Non, tu ne l'avais pas oublié. Pourquoi me laisser me perdre ainsi, ce soir ? Que prévois-tu ? J'en devenais suspicieux, et affichait une mine pincée. J'avais dis pas prise de tête, hein ? Oui, pas de prise de tête. Je balayais toutes ces pensées d'une main dans le vide, remarquant que Vic, fébrile semblait appréhender de tirer. J'en souriais, amusé. Irrécupérable, toi, hein ?


-Tarde pas trop, sinon faudra aller jusqu'à Mars!

Dixit la fille qui galère à tirer sa latte. Je gloussais, moqueur, la laissant en galère avec ma roulée. Si c'est une grande fille, elle va assumer, hein. Je la lorgnais, m'assurant tout de même qu'elle n'allait pas direct se prendre pour Icare et s'écraser comme une merde en bas. Elle inspirait, avant de tousser comme une dingue ou un poussin qui hyperventile. Oui, ceci est possible et je vous merde. Bien à vous. Quelle douée. Elle gardait ma roulée à la main, tentant de calmer ses toussotements. Voilà, Vic, tu venais de fumer ta première ce soir. Et encore je l'avais coupée. Je pense que un bon bon joint comme me fait Silas, tu serais déjà en bas. En bas ? ~ Ça me rappelait un souvenir plutôt marrant ça. Tu sais, celui de ton chevalier ? Je me secouais la tête, alors qu'elle me rendait ma roulée que je me pressais de porter à mes lèvres pour souffler ces pensées.


-En fait, c'est vraiment de la merde ces trucs... Je comprends pas comment tu fais…

Je souriais. Quand tu veux oublier, ce n'est pas si mal.

« Ce n'est pas grand-chose, quand tu veux oublier, Vic. »

Répliquais-je, un ton un peu perdu. Ouais, quand tu veux oublier, tout est bon. Même une roulée. Même tout ceci… Qu'importe ce que je ferais… Je n'aurais jamais ce ticket que je recherche tant depuis des années. A moins de sombrer, encore et encore. J'ai testé, ce n'est pas si désagréable, en soit. Elle s'étirait, et semblait être bien plus détendue. Déjà perchée ? Eh beh, si il lui en faut si peu, c'est assez inquiétant. Drôle de soirée, vraiment. Je n'avais rien pensé, imaginé, souhaité de tel. J'expirais, écrasant la fin de ma roulée sur le béton. Je me sentais léger aussi. Juste parfait. Le juste milieu. J'ai ma tête ? Foutage de gueule. Je ne l'ai jamais eu, et je ne l'aurais jamais !


Perchée, oui. Elle gloussait comme une idiote avant de me passer la main sur le visage, me foutant les cheveux en pétard. Eh…

-Uh~ C'est touuut douuux... Tu me dis ton shampoing?

Perchée, ouiiii. Je riais, me disant que parfois, elle était désespérante, quand elle s'y mettait. Je me sentais juste pas à mon aise, d'avoir sa main, là, collée sur mon visage qui en faisait le tour, pour en sentir les formes. Je n'aime pas trop ça, mais j'étais trop posé pour me reculer et la bâcher. Alors je laissais faire. Elle se redressais alors d'un coup, maladroitement, tenant à peine debout, après avoir noué son bandage à son poignet. Autre souvenir… Je baissais la tête, quelque peu mal. Ça en fait trop pour une soirée ? J'ai bon être posé, mon cerveau s'est mis en tête de se les ressasser car elle est là. Et ça fait si mal… Mais tellement de bien. C'est n'importe quoi, bon sang.


Je me redressais, lui attrapant la main pour éviter une éventuelle chute alors qu'elle me traînait le long du rebord. Une balade ? Pourquoi pas ? Je suivais, riant à mon tour, préférant mettre mon esprit sur off le temps de cet interlude au clair de lune.

« Dis-moi, il y a-t-il quelque chose que tu puisses tenir, Vic ? »

Je riais, marchant en équilibre sur le rebord, Vic à ma suite, pivotant sur une jambe. J'étais bien là, à faire le funambule à la lune, à plusieurs mètres de hauteur. J'aime le vide. Après tout, chuter, m'écraser et revenir, je ne connais ça que trop bien, huh ? ~

Et elle suivait, vraiment perchée. Que devais-je en penser, dans le fond ? Je la tenais toujours, m'assurant qu'elle ne chuterait pas. Sérieusement, humanité, pourquoi t'enquiers-tu d'elle ? Je soupirais, continuant ma démarche sur le rebord, pivotant tantôt sur la jambe droite, tantôt sur la gauche. On était comme un spectacle, et Vic et moi étions les funambules, fiers représentants qui se jouaient de la mort. Oui, c'était ça, je suppose. Elle alignait ses pas, alors que je sentais sur ce visage si enfantin le reproche. En même temps, à la voir gonfler les joues comme ça en fronçant les sourcils, je comprenais que madaaame n'avait pas apprécié que je lui grille la prio. Bah quoi ? Elle préférait s'écraser en bas ? Pas de soucis. ~ Oh, je redescend, moi ? Non, non, remonte, Auen, remonte. Continuons de marcher, c'est bien de marcher, hum ? Vic s'accaparait alors d'un air supérieur, tordue de rire, répondant à ma taquinerie :

-Heuuuuuuuuuuuuuu, je tiens très bien touuuuut pleins de trucs d'abord! Genre, heuuu... Le chocolat! Je tiens très bien le chocolaaaaat! Puis regardeeeeee!


Je levais un sourcil avant d'exploser de rire, franc. Sérieusement ? Vic… Je continuais de rire, avançant, me questionnant sur le fond de cette soirée. Oh, fuyez vous, je ne vous aime pas… Regarde quoi ? Je gardais un sourire amusé, la lorgnant perplexe, attendant ce quelque chose qu'elle semblait vouloir me montrer. Pourquoi au fond de moi, j'avais l'impression de récupérer mes 10 ans… ? Je n'aimais pas ça, sincèrement. Passons outre, allez. Je lui faisais face, continuant de reculer sur la rambarde, funambule que je suis. Elle courait d'un coup vers moi, agrippant ma chemise. Je comprenais. Elle me tenait, hein ? J'esquissais un sourire doux, me disant que je ne savais vraiment plus si cette soirée était si bien que ça. Ce n'était pas elle que j'avais en face de moi. Pas elle. Passons outre, encore. Alors qu'elle attrapait ma main pour la glisser sous son menton tout comme elle faisait de même avec la sienne sous mon menton, elle continuait de rire. Encore et encore.


Pourquoi ? Pourquoi ne suis-je pas sincèrement heureux pour elle, là ? Regarde, Auen. Elle rit, elle sourit. Depuis combien de temps ne t'avait-elle pas montré ça, hein ? Alors pourquoi… ? Pourquoi je sentais encore ce maudit coeur se froisser tandis que mon humanité faisait la moue. Je ne veux pas comprendre ça. Non, je ne veux pas. Je gardais un sourire, qui avait diminué, se faisant discret. Ce n'est pas elle…

-Je te tiens, tu me tiiiiiens par la barbichettteeeuh, le premier de nous deeuuux qui riraaaa aura une tapèteeeeee!~ 

Et elle chantait, de cette voix nasillarde. Je devrais être content, hein, de la voir si joyeuse. Ce n'est que factice, je le sais bien. Ne va pas oublier comme moi, Vic, je te prie. Je suivais, chantant à mon tour, bien que l'esprit n'y était clairement pas. Je ne suis pas perché moi. Je sais où m'arrêter. Vic explosait encore de rire, mimant un « pas taper », pour la tapette. Je suis trop ailleurs pour ça, Vic, vois m'en désolé. Je n'ai pas envie de frapper aujourd'hui.


Cette soirée finalement, prenait une tournure que je n'aimais guère. J'aurais dû faire mon adulte et lui refuser une latte. Regarde le résultat mec. Elle est heureuse, certes, mais ce n'est que du vent ! Du vent ! Elle n'est pas celle… Cette Victoria là. Celle qui m'avait foutu la honte avec son bonnet rose, celle qui avait fini HS après un caprice… C'était juste une Vic mal, paumée, qui voulait oublier. Je ne suis pas là pour ça, pardonne-moi. Je comprenais à quel point j'avais pu lui faire du mal, de mon côté, en fin de compte. Quel idiot je faisais. Elle descendait du rebord, s'équilibrant de ses deux bras, tanguant comme tanguerait un avion. Comme tanguait mon coeur. Humanité que j'exècre. Elle tournait sur elle-même, frappant dans ma bouteille d'Akevitt. Eeeeh… Je faisais une moue dépitée, voulant à tout prix récup' ma bouteille pour la finir avant que Vic, perchée comme elle est, ne s'y attaque. Je m'inquiétais sincèrement pour elle… Humanité de merde, vraiment. Elle se penchait pour renifler la bouteille, venant vers moi d'un pas de travers, bouteille en main.


Vic, arrête un peu… Je descendais du rebord, voulant l'aider à se tenir debout. Seulement celle-ci se vautra avant même que je puisse venir à elle, lâchant ma bouteille qui valsa et s'écrasa en bas. Tss… Tant pis. Je venais vers Vic, une moue un peu inquiète à la tronche. J'arrivais à sa hauteur quand elle me tira brusquement vers elle. Surpris, je me déséquilibrais pour me casser à mon tour la gueule sur elle. J'avais l'air fin, comme ça. Vic, redescend bon sang…

-Y râle alors qu'il aurait pu se la prendre sur la tête, il devrait être conteeeeent!

Oui, il aurait pu, punaise… Il aurait pu. Je soupirais, inquiet et dépité. Vraiment dépité. La Victoria que je connais n'ira pas aussi bas. Ne fait pas comme moi, pauvre idiote…

« En effet, content... »

Lâchais-je, avec nettement moins d'entrain dans le ton. Elle bougeait la tête dans les deux directions, me poussant des mains. Alors un chut, et maintenant ça ? Je suis un peu perdu, là. Je riais, dépité.


-Tu pues l'alcool Auen, franchemeeeent! Faut arrêter hein, c'est pas cool! Après, on fait des conneries et tout puis c'est nazeuuuh! Puis parait que ya des gens qui on l'alcool mauvais, c'est vraiment pas cool hein!

Je fermais les yeux un court instant, me décalant pour poser mon cul sur le sol, un long soupir sortant de mes lèvres. Je sais me tenir, moi. Contrairement à certaines. Pensée ironique que voilà. Cette soirée avait tout pour être bien. Et je l'ai écouté en lui filant ma roulée. Quelle belle ânerie. Si j'avais su que tu avais besoin d'oublier à ce point je t'aurais laissé la place, Vic. Je ne t'aurais pas donné un ticket factice de quelques heures. Où était-elle, cette Victoria là ? Je regardais sur le côté, dos à la lune. Voilà que je me sens perdu à mon tour. Apaisement, t'es où, mon pote ?


« Je tiens l'alcool, moi. Contrairement à certaines qui finissent comme de grosses otaries sur mon dos car elles tiennent pas un fond de Poteen, hein ? »

Je lui répliquais avec un ton taquin. Je tentais, comme je pouvais. Elle semblait heureuse, alors soyons le pour elle. Elle en a besoin. Je suppose ? Je penchais la tête en arrière, expirant. Humanité à la con qui fait que je m'inquiète pour elle. Que je m'enquiers d'elle. Que malgré qu'elle ait changé ainsi, je l'aime… Encore ? Je me dépite moi-même, ah ! Ironie de merde. Et la lune sourit, dans son domaine étoilé. Je me relevais, me craquant le cou, mettant les mains dans mes poches, tête dirigée vers ce domaine étoilé.

« Tu redescends un peu, Vic ou bien ? »

Je riais, bien que franchement, j'aurais préféré la secouer comme un pommier pour qu'elle récupère sa tête. Mais je n'ai pas envie. Je veux juste la revoir elle. Chose impossible à présent. Oh, que je te hais, que je te hais, chère humanité de merde.

Regarde le ciel, Auen, regarde-le. C'est toujours mieux que de regarder cette Vic que tu ne connais pas. Oui, toujours mieux. Elle semblait revenir à elle, chantonnant. Enfin, presque à elle. Je ne savais plus que dire ou faire, moi. Je m'inquiétais pour cette idiote alors qu'il n'y avait pas lieu d'être. Que je hais cette humanité. Elle me tuera ? Ou je le tuerais avant ? Oh, qui sait ? Je gardais les yeux rivés sur le ciel, laissant mon esprit vagabonder. Pas de questions ce soir. Pas de prise de tête. C'est ce que je voulais. Et encore une fois… C'est plié. Suis-je donc maudit à ce point ? Je suis, enfin je devrais être ravi de la revoir ainsi. Si contente. Si seulement ce n'était pas factice. Et elle semblait s'en rendre compte, redescendant bien vite de son nuage. Elle faisait une moue, sûrement piquée par ma taquinerie. Oh, qu'en sais-je ? Je me laissais tomber en arrière, croisant les bras derrière mon crâne, allongé de tout mon long. La vue est bien mieux ainsi.

-Je suis pas une otarie, je suis une loutre...


Je riais vaguement, complètement ailleurs. Mon inquiétude pour elle me faisait un peu planer. Je n'avais plus envie de la surveiller. Je n'avais plus envie de m'inquiéter pour elle. Je n'avais plus envie de comprendre ses sentiments que j'avais envers elle. Je voulais juste tout mettre sur off, fermer les yeux, et me rendormir comme prévu. C’était ça, ma soirée, avant. Mais pourquoi une loutre ? Je n'en savais foutrement rien. Et de ce rire, je soupirais, gardant mes yeux sur les étoiles. Pas de questions, pas de questions… Non, rien de tout ça. Juste la lune et sa banderole étoilée. C'est tout. Vic semblait se poser à Terre petit à petit, affichant une mine perdue. Pardon, je n'ai pas payé pour te voir ainsi, Vic. Tu n'es pas ainsi, tout bonnement. Je lâchais un énième soupir alors qu'elle se passait la main derrière la tête, embarrassée, probablement ? Je m'en moque. Contre-coup, allez ? Elle était juste amorphe. Je le sentais d'ici. C'est ça, l'herbe du papou, quand tu ne la tien pas. Tu pètes le feu, et tu redescends tout aussi violemment. Elle soupirait elle aussi, reprenant son souffle, molle.


-J'crois juste que j'ai loupée atterrissage... Mais sinon ouais, je suis redescendue... Je crois... Désolée…

J'esquissais un sourire sarcastique, ne décrochant pas mes yeux de la lune.

« C'est déjà ça. Je ne t'ai pas connue ainsi. Vois m'en désolé de me faire du souci pour toi. »

C'était purement sincère. Je ne fais pas parti de la catégorie des démonstratifs émotionnels qui te crachent leurs émotions à la gueule. Oh, ça, loin de là. Mais quand je dis une chose sur ce propos, elle est souvent vraie. A faire croire que mon coeur s'accrochait vainement à cette Victoria là. Celle qui ne se serait jamais laisser aller aussi bas. Oui, celle-ci, de Victoria. Que tu es con, coeur, que tu es con. Je plissais les yeux, m'étirant, alors que je sentais Vic s'allonger à son tour, complètement las. Tu me diras après un trip pareil, c'était normal.


-Dis... Même si un jour, j'suis au bord de la mort, à terre, avec du sang partout, une jambe et un bras en moins, que c'est la guerre et que ma dernière volonté, c'est d'encore toucher à ce machin... S'il te plait, achève moi plutôt... C'est clairement de la merde, ce truc!

Je lâchais un bref rire, ne tournant toujours pas ma tête vers elle, captivé par la lune. La guerre, huh ? Qui aurait comme dernière volonté de se fumer un joint, sérieux ? Et je riais, plus franchement, cette fois-ci. Qui aurait une volonté pareille ? Cette phrase me ramenait encore un autre souvenir. Tant de souvenirs que j'aimerais pouvoir me remémorer sans avoir mal. Mais ceci est chose impossible, après tout.

« Je te laisserais crever et je le fumerais devant toi, ne t'en fais pas ! Au pire je t'en passerais un. Au chocolat, puisqu’il paraît que tu tiens trèèèèès bien le chocolat ! »


Je me fichais une fois de plus d'elle, ouvertement. Je soupirais longuement, un sourire ténu se dessinant sur mes lèvres, me décidant enfin à tourner la tête vers elle, qui se passait la main sur le visage, comme pour ne pas repartir. Ahlàlàlà… ~

-Auen... Je voulais te demander mais... C'est quoi pour toi, les trois plus belles choses au monde pour toi?

Hum ? J'arquais un sourcil, perplexe. C'était quoi, cette question ? Les… Trois plus belles choses au monde… Pour moi ? Je rivais de nouveau mes yeux sur le ciel, me murant dans le silence un court instant. Choses les plus belles ? Je n'en sais rien… Foutrement rien. Je ne veux pas réfléchir là. Pas envie. Pas soirée pour ça. Pourtant mon esprit s'y mettait, que je le veuille ou non, cherchant activement. Je ne veux pas bon sang… Ce n'est pas si compliqué, si ? Je lâchais un râle agacé.


Plus belle chose, vraiment ? Que suis-je censé répondre ? Oh, quand il est mort ? C'en était une ? Peut-être bien ? Oh, je ne sais plus. Je ne sais pas. Je m'en moque. Hahah… Qu'en sais-je, oui ? J'esquissais un sourire amusé, avant de fermer les yeux. Oh, je le sais, au fond. Je le sais parfaitement. Mais une chose nommée norme, n'accepterait pas le concept, vois-tu ? Je serrais le poing, me disant que je partais là. Et que ce n'était pas le but de cette soirée. Non, ça ne l'était pas. Alors revient Auen, revient, pauvre con. Revient ! Je riais, me foutant bien de ma propre tronche. Je décolle, allez. Non. Reste sur Terre, reste…

« Je... »

Je sentais ma propre voix mal-assurée, tremblante, alors que je tentais de virer toutes ses pensées de ma tête. Pas de questions, rien… Rien.


« Je n'en ai pas. Il n'y en a pas. Enfin, je ne me suis jamais posé la question, et je m'en moque un peu... »

Mon ton en devenait un peu morne, contre mon gré. Je mens, oui, je mens. Clairement. Le monde ? Voyez mon monde intérieur, vous saurez vite ce que j'en pense. Les trois plus belles choses ? Oh, hors-normes, évitons. Je tournais ma tête sur le côté, un peu perdu, préférant relancer la conversation. Oublions. Révolu.

« Et toi ? »

Était-ce donc si tendu, cette atmosphère pour que Vic lâche ce rire ? Le rire de cette Victoria gênée, qui tente de rattraper une bourde ? Avait-elle fait une bourde ? Oh, qu'en sais-je ? Je gardais les yeux rivés sur le ciel, la tête sur le côté, ne l'observant pas. Ne l'écoutant pas. J'étais dans ma bulle, là. Et j'y étais bien.

-Si je devais en donner trois... La première serait la première fois que j'ai ouvert les yeux pour voir.... C'était un soir, et la lune souriait dans le ciel, avec les étoiles partout autour d'elle... Juste
ces quelques secondes à la regarder m'ont semblé être les plus belle de toute ma vie d'avant… La seconde... Ma maison et ma famille sans doute, tout ce qu'ils représentent pour moi… Et la troisième, c'est le cadeau que tu m'as fait à la fin des vacances de la Toussaint... Même si je ne peux plus en profiter à présent, j'en garde l'image en tête, et la joie aussi de l'avoir reçu…


J'écoutais d'une oreille distraite, levant un sourcil surpris. Sérieusement, que j'en faisais parti de ces plus belles choses ? Hahah… Non, pousse pas Vic, là, ne pousse pas. Je devrais trouver ça adorable, gentillet, je suppose ? Certes, cela me gêne, et je réprimais un léger rire. Mais je ne mérite pas tant. Je ne méritais pas cette intention. C'est juste stupide. Stupide et trop… Humain. Humanité de merde, ne vas-tu donc jamais me lâcher ? Un léger soupir, alors que je me décidais à regarder de nouveau Vic. Elle relâchait un bras qu'elle avait du lever pour me montrer le ciel. Pardon, je ne regardais pas. J'affichais un sourire ténu, alors qu'elle baisait la tête, ses joues virant au cramoisi. Oui, oui, tu as dit un tel truc, Vic. Je riais, moqueur, recroisant de nouveau les bras derrière mon crâne. Je n'avais rien à lui dire, que voulez vous ? Mon cerveau était sur off, oui.


Et elle riait, de ce visage coincé, complètement mortifiée de sa bourde. Oh, ce n'est rien. Tu sais, je ne capte même pas la moitié de ce que tu m'as dit, Vic. Alors bon… Je fermais les yeux, la laissant parler. Et moi je planais. Je planais.

-Je dis vraiment des trucs qui ont l'air débile parfois, je m'en rend compte... C'était même un peu niais sur le coup, désolée!

J'hochais la tête, les yeux clos, sans un mot. Pardon, je rattrape cet instant de privauté dans le monde des rêves. Son rire venait s’immiscer dans mon monde de rêveries. Je déconnectais. Calmement, tranquillement. Je n'étais juste plus là. J'avais juste besoin de cette pause. Juste besoin. J'étirais un léger sourire satisfait de ce silence. Oh que je l'aime, ce silence.


Ce silence. J'en profitais enfin. Enfin. Je me laissais aller à mes pensées, à mes rêvasseries, à ma solitude. Et ça revenait, hein ? Tout ça. Tout ces souvenirs. Tout ces moments. Je pouvais prendre le temps d'y réfléchir, ici, dans ce monde de rêves. Dans son monde irréel. Pourquoi ne me lâchent-ils pas, comme cette humanité ? C'est un complot ? Je riais, sarcastique, alors que tu tendais de m'atteindre de ta voix, toi. Que me veux-tu, Muninn ? Je suis bien surpris que tu sois aussi… Poli ? J'esquissais un sourire sarcastique. Alors quoi ? Hum ?

« Je crois qu'elle te parle, ta blondasse. ~ »

Hein ? Le noir le plus complet. Juste ce malaise, encore. Encore ce malaise. Non, je… Je…
J'ouvrais les yeux brusquement, le souffle court, me redressant brusquement, le coeur battant la chamade. Je me passais la main sur le front, tremblant.


-Ils ont vraiment... Pas beaucoup de gêne... Voilà pourquoi j'aime pas les soirées…

J'écoutais d'une oreille, lâchant un râle rageur.

« P*tain… Enfoiré. »

Je plantais mes yeux dans ceux de Victoria, qui maintenant n'était plus cramoisie mais carrément rouge pétante. Il se passait quoi, là ? Je la sentais bougonne. Voir gênée ? Embarrassée ? Au choix ? J'arquais un sourcil. Sa phrase, ah oui… Je tendais l'oreille. En effet. Pas discrets nos lapins. Je m'en moquais pas mal, franchement. Ça n'allait pas m'empêcher de me rendormir. Je me redressais, faisant quelques pas vers le rebord du toit, avant de m'éclaircir la gorge, avant de gueuler d'une voix claire :


« Oï, les lapins ! Ouais, ouais, là, le couple pas discret du tout qui est actuellement en train de réveiller la faune du coin ! Je sais qu'Halloween c'est cool, qu'il fait frais, que l'ambiance est au rendez-vous, mais si vous voulez faire vos lapins lubriques et vous emboîter en paix, je connais un hôtel sympa dans le coin ! Vous voulez l'adresse ? »

Je soupirais, blasé, bien que mon ton fût, lui amplement moqueur. Sérieusement, s'ils voulaient se faire une partie de Tétris, il y avait mille et un autre endroit pour se faire. Après c'est vrai que le clair de lune, c'est mignon, c'est joli, il y a de la lumière… Mais pas pour vous sauter les gens. Je soupirais une seconde fois, calant mon dos contre la rambarde, tête en arrière. Je zieutais la tomate qui ne semblait plus où savoir se mettre. J'élargissais un sourire provocateur, tournant la tête vers le vide.

« Bah quoi, il y a un problème, Vic ? »

Eh bien voilà qui était fait. Nos chers lapins lubriques semblaient avoir reçu la missive et cessé enfin leurs bruits. Et elle… Elle me défigurait comme si j'avais encore fait une ânerie. Oh, peut-être bien ? J'ai certes dérapé il y a deçà quelques secondes, mais je ne vois pas l'utilité de m'en excuser, Victoria. Alors ferme cette bouche d'ahurie, là. On croirait que tu vas finir par nous gober une mouche, ou si l'on reste dans le cadre des lapins… Oh, vous avez compris. Je soupirais, m'affalant contre le muret, me craquant le cou. Oh, quelque peu lassé. Et secoué. Sérieusement Muninn, tes coups de vache comme ça… Épargnes-les moi. Oh, je demande trop, je le sais… Je le sais. Je regardais alors Vic qui se passait les mains sur les joues. Qu'espérait-elle ? Faire redescendre la pression ? Oh, qu'en sais-je ? Je m'en moque bien. Elle me connaît. Elle sait bien que moi, fermer ma gueule, je ne connais pas trop. A part avec toi, mais ça… C'est un autre cas. Elle restait un instant comme ça, semblant profiter de la fraîcheur de ses mains pour calmer la chaleur montante de ses joues. Drôle de chose. Le froid… Je ne connais ça que trop bien ? Je ne connais pas la chaleur, contrairement à elle. Oh, je suppose qu'un jour, il faudra que je m'y teste, hein ?


Vic avait fermé les yeux, se réchauffant à présent les mains sur ses jambes. Frileuse, j'avais oublié. Pourtant l'air n'était pas si froid ? Je ne m'en rendais peut-être pas compte aussi. Oh, je m'en moque. Ici, c'est Vardø en pleine canicule. Oui, oui. J'expirais, hésitant à me faire une roulée. Quoi que… Je n'étais pas sûr d'avoir de quoi en faire une, là, sur moi. Un second soupir, moins marqué, alors que ma question la laissait perplexe. Je demandais juste s'il y avait un problème, Vic. Pas le peine de faire cette gueule perturbée. J'affichais un sourire amusé, penchant à nouveau ma tête en arrière. La vue est pas mal de dos aussi. Je comprenais qu'elle souriait à se petit soupir qu'elle lâchait. Celui de la gamine toute heureuse. Oui, celui de cette Victoria là. Je souriais à mon tour, la zieutant un court instant alors qu'elle galérait à chercher de quoi se réchauffer. Je le voyais qui partait à tâtons, et revenait avec ce qui semblait être une couette. Et cette mine, cette mine.


J'arquais un sourcil, moqueur. Elle me montrait la mine d'une gagnante, comme si elle venait de monter l'Everest. Je riais, taquin, alors qu'elle se décidait à prendre la parole.

-Il n'y a pas de soucis Auen... Je ne me doutais juste pas que tu pouvais avoir ce genre d'adresse dans ton répertoire... Cachottier!

Je soupirais, soulagé. Quand tu voyages souvent entre l'Irlande et la Norvège, tu connais les hôtels du coin, quand il s'agit d'être à l'heure. Cette pensée me laissait amer, une fois de plus. Je me rappelais encore que je ne verrais plus de ci-tôt mon chez-moi. Peut-être un jour devrais-je affronter cette peur… ? Ouais, il le faudra. Je remarquais qu'elle venait vers moi, s'enroulant dans la couverture avant de s'asseoir à mes côtés de et m'en passer un bout. Je n'ai pas froid, moi. Je lui rendais un gros bout, c'était elle, le pingouin.


Je me sentais quelque peu gêné qu'elle vienne se coller à moi, comme ça, d'un coup, tête sur mon épaule. Elle était fatiguée en plus. Eh, ne va t'endormir là… Je souriais, amusé. Elle ne change pas, pour ça. Toujours à la recherche de l'une de mes mains. Il faudra qu'elle m'explique sérieusement un jour pourquoi mes mains. Cette pensée me faisait rire. Elle avait toujours cette manie. A l'hôpital, aux sorties, aux vacances, et là… Toujours.

-Mais merci, c'est bien plus calme maintenant... Je comprends pas ce qui les motive à faire ce genre de choses, franchement... Je dois encore être trop gamine pour comprendre, je sais pas…

Je ne disais rien, me contentant de laisser planer le silence. Je n'avais pas envie de parler plus, en fait. Je commençais à me poser moi aussi. Mais dormir avec elle, là sur mon épaule… C'était rudement gênant.


-C'est... Une plutôt bonne soirée finalement…

Et la voilà qui partait, yeux clos, un sourire enfantin au visage. Oh, oui, j'avais l'impression d'avoir une enfant de huit ans qui me dormait dessus. Elle ne change pas, vraiment… Oui, c'est bien elle. Je le regardais, un sourire un peu coincé au visage bien qu'au fond, mon humanité, elle, était ravie. Je n'osais rien répondre, et me contentait, après un certain temps de me lever, levant doucement la loutre avec moi.

« Tu devrais te coucher, idiote. Je te raccompagne. »

Je la laissais enroulée dans sa couette, alors que je la calais sur mon dos. Oh, j'avais envie de faire le con, et de rentrer comme j'étais venu. Par le toit. Par le vide.


Je sautais alors par dessus la rambarde, tenant Vic d'une main, essayant au maximum de descendre le pan de mur le plus doucement possible afin de ne pas la réveiller. Ça m'amusait, ce petit défi. Je n'ai jamais descendu ce mur là, d'une main avec quelqu'un. Oh, rassurant ? Sûrement. Je riais, descendant calmement, point par point le mur, alors que Vic semblait vraiment dormir. Une loutre ? Marmotte, oui. J'arrivais à la fenêtre de ma chambre, m'y glissant sans aucune difficulté, la marmotte toujours sur mon dos, roulée dans sa couette. Je soupirais, fermant la fenêtre et entreprenant de ramener la belle au bois dormant dans sa chambre. Encore un énième souvenir. Résolu, Auen, résolu. Je descendais les marches, me rendant à l'étage inférieur, cherchant des yeux sa chambre. 107, je crois ? Je finissais par y arriver, voyant que la porte n'était pas fermée. Sa coloc' est du style je laisse l'entrée libre ou ? J'entrais, déposant délicatement la marmotte dans son lit, la bordant de sa propre couette. Frileuse comme elle est, vaut mieux deux couettes.


Je le regardais, un sourire ténu aux lèvres, puis un soupir. Quelle enfant, tu fais, Vic. Je réprimais un rire, avant de me reculer, la laissant dormir. Oh, puis fiotte. Je lui déposais un baiser sur le front. Douce humanité de merde que voilà.

« Dors bien la marmotte. Franchement une loutre, c'est un peu mentir sur la marchandise ! »

Lui chuchotais-je d'un ton taquin. Je m'éloignais, fermant sa porte. Quelle soirée. Ni zen, ni rien. Pas de mots pour ça. C'est étrange, hein ? Oh, qu'est-ce-que j'en ai à cirer ? J'allais bien vite retourner finir ma nuit à la belle étoile. Après tout, ce n'était pas des lapins lubriques qui allaient m'empêcher de fermer l'oeil. Alors ce n'était pas une marmotte frileuse qui allait le faire. Je souriais, sifflotant, repartant pour le toit. Quelle soirée, ouais.