Parler de moi ? A quoi bon ? Personne ne veut me connaître... Et vous non plus, vous ne voudrez pas me connaître. Je suis un jeune garçon rêvant de devenir transparent aux yeux du monde, qui aimerait trouver des gens pour l'aimer. Au lieu de ça, je ne reçois que des coups, je n'entends que des moqueries à mon égard... Où est ma place ? La seule que je vois, c'est celle qui m'est dédiée dans les décombres de mon âme... Celle dans laquelle je me réfugie lorsque je suis triste. Car la solitude est devenue ma meilleure amie, et cela depuis de longues années. Je me suis toujours laissé marcher sur les pieds.

Car je suis trop faible pour leur dire quoi que ce soit, pour résister à leur pic dirigé contre les morceaux de mon coeur Je fuis les problèmes, je ne les affronte jamais. Je me cache derrière mes larmes, dans un coin sombre, attendant que la douleur qui m'habite passe un jour. Je suis devenu introverti avec le temps, et lorsque je m'adresse aux rares personnes qui désirent m'entendre, je m'emmêle les pinceaux, et je bégaye. Charmant, n'est-ce pas ?

Mais c'est pire aujourd'hui. Depuis qu'il m'habite, ma tristesse s'est transformée en douleur presque incessante. Il me traite comme le pire des déchets. A ces yeux, je ne suis qu'un jouet. Et le pire dans tout ça ? C'est que je ne veux pas de lui. Mais que je suis contraint à l'obéissance, si je veux pouvoir trouver un léger havre de paix en moi.

C'est bien parce que je ne suis qu'un faible...

Je suis un garçon plutôt banal... Enfin, je crois... Je ne suis pas très grand, je ne dois pas dépasser le mètre soixante pour mon âge, ce qui ne joue pas en ma faveur... C'est bien que connu que les petits sont les proies les plus faciles...Et mon poids ne n'aide pas non plus... Vous comprenez, quand on fait une cinquantaine de kilos pour cent soixante centimètres, on est pas forcément très épais. Et forcément, les muscles ne suivent pas non plus.

Alors bien évidemment, c'est devenu un des critères de sélection de la victime parfaite... Puis pour noircir le tableau, dois-je rajouter que mes cheveux sont d'un rouge frôlant le roux ? Vous savez... Cette couleur qui donne lieu à tant de stéréotypes... Je sais que j'ai une âme ! Une âme de faible, mais j'en ai une... Par ailleurs, mes yeux noisettes rappelle la couleur de mes cheveux mais c'est sûrement la seule chose que j'apprécie chez moi... Mes yeux. Dommage qu'ils soient toujours rempli de larmes.

J'essaie de me faire discret, alors vestimentairement, je ne suis pas très loin du niveau zéro en terme de classe. Mes chaussures en tissu, mes pantalons ni trop larges, ni trop serrées, et mes sweat à capuche me rendent banal. D'ailleurs, je prends toujours une taille au dessus, pour mes sweat. Comme cela, je peux me cacher dedans. Mais ma chevelure gâche toujours cet effet... Et pour couronner le tout ? Mes multiples pansements. J'en porte tout le temps... Sur les doigts, sur le visage... Des rumeurs disent que j'essaie simplement de me raser. Mais je suis imberbe...

Non... Je suis juste trop juste trop faible face à ses actes.

Je... Je m'appelle Nathan-naël. Pryam. J'ai... Qu-quinze ans... Ca ne vous suff-ffit pas?Je... Laissez m-moi tranquille... Sinon il me fera du mal...


Où suis-je? Vous êtes touj-ours là... Dites lui d'arrêter... Je vais vous racon... Je vais vous raconter...
Je m'appelle Sire Orchidoclaste-thanaël Jus... Justin Pryam. Je n'aime pas mon deuxième prénom... Le Maître m'appelle tout le temps comme ça, lorsqu'il me fait du mal... Pourquoi vous m'avez choisi? Ca n'était pas comme ça, avant... Mes parents m'aimaient ! J-je crois... Non... Je ne me souviens pas de mes parents... Ils sont morts quand j'étais p-petit. Des méchantes p-personnes sont venues les voir. J'ai senti un grand coup, et quand je me suis réveillé... Mes p-parents...

A l'école, on m'a toujours consid-déré comme un jouet... Les professeurs se fi-fichaient que l'on me pousse dans des esca-caliers, je n'étais pour eux qu'un enfant pleurnichard... Je suis trop f-faible pour résister à leurs moqueries. Je n'avais auc-cun ami. Ils me frap-paient, m'insultait... J'étais trop f-fai... Non! Laisse m-moi tranquille ...

C'est normal si j'ai aussi mal? Est-ce que vous allez me soigner? Va-t'il partir? Je ne veux pas être son esc-clave...

Je suis arriv-vé ici il y a moins d'un mois..... Personne ne s'intéresse à moi. On me regarde avec dégout. Pourquoi? Je ne fais rien de m-mal... Et on m'a amené dans une salle sombre, c'était.. hier? ... Ou c'était il y a deux semaines? Je... Je ne sais plus... Ne me forcez pas à raconter ça...
Non... Il me fait mal... Aidez-moi !

C'était un immense cimetière... Il y avait du sang, des cris de douleur... De désespoir... Et... Il ét-tait là... Et... Je me suis réveillé... Il était là... Av-vec moi. Fai-tes le partir ! Il ne fait que me blesser... Il me dit qu'il me soumettra comme tout les autres... Que je ne vaux rien... Que je ne mérite pas de vivre. Pourquoi il me fait ça? Pourquoi me torture-t'il ainsi? Il me donne de violentes douleurs... Il veut me tuer...

J'avais encore cédé... La pression de certains élèves me terrifiaient. J'aurais aimé réagir, leur dire que je n'étais pas un peureux, que j'avais du cran, que je voulais simplement être leur ami... Mais j'ai fui en courant. Et je me suis retrouvé ici, dans un endroit qui me correspondait tellement. Mais je ne voulais pas ouvrir les yeux... Il était là... Je le sentais. Sa voix retentit doucement à mon oreille. Trainante, et... vile. Un frisson me parcourut l'échine. Que me voulait-il, cette fois-ci...

*Ouvre les yeux, Justin... Allez, ouvre-les...*

Je gardais obstinément les yeux fermés. Mon cœur battait désormais la chamade, et si j'avais été plus jeune, mon pantalon aurait été victime de la peur qu'Andjéty m'infligeait... Mes pensées se concentrait sur autre chose, afin de ne pas écouter le Roi des Tombes. Je ne céderais pas. Pas avec lui. Mais je ne voulais pas souffrir.

*OUVRE LES YEUX ! C'EST UN ORDRE !*

La voix du Divin tonna dans tout mon esprit, qui fit trembler chaque parcelle de mon corps. Une voix dure, sans appel, qui me fit immédiatement ouvrir les yeux. J'avais cédé. Pourquoi parvenait-il à me soumettre aussi facilement à sa volonté? Pourquoi ne pouvait-il pas me laisser en paix?

En réalité, ce j'avais autour de moi n'était que l'obscurité et le silence d'un des placards de ma chambre. J'avais réussi à me caser dedans comme à chaque fois que je fuyais une situation déplaisante. J'aimais l'obscurité. Il n'y avait personne pour me juger, pas même mon propre regard. Mais depuis qu'Andjéty m'habitait, même l'obscurité n'était plus mon refuge. Je revoyais encore et encore la vision d'horreur qu'il m'avait infligé lors de notre première rencontre. La tombe de mes parents parmi d'autre m'avaient terrifié. Cet accident m'avait toujours affecté, et je n'étais jamais allé là où ils étaient enterrés. J'avais peur toujours eu peur de réaliser qu'ils étaient partis.

*Oh Justin... Tu n'es vraiment qu'un pauvre idiot. Tu crois pouvoir me résister longtemps? Je vais te dévorer. Sors de ce placard et affronte la dureté de la vie... Ou de la mort...*

Un rire démentiel s'empara de moi, comme s'il me transmettait son émotion. Mais cela m'effraya, et je sortais en hurlant pour découvrir la lumière du jour une nouvelle fois. Je clignais rapidement des yeux afin de m'habituer à la vive luminosité, et lâcha un soupir de désespoir... J'étais sorti du placard... Un accès de colère me prit mais je n'osais pas le faire exploser. Cela m'arrivait à chaque fois. Je suis souvent en colère. Mais... Je ne suis pas très courageux, et j'ai peur des conséquences. Comme si toute la Terre me tomberait dessus le jour où je laisserais mon corps et mon âme l'exprimer. Une nouvelle fois, je me tut.

*Tu es un bon esclave, Justin. D'ici quelques temps, tu seras capable de tuer pour moi, n'est-ce pas? Ou mieux... De soumettre à ton tour...*

C'était la goutte d'eau. Je ne voulais faire souffrir personne ! Pourquoi fallait-il je me mette à obéir aux ordres d'un démon ? Je ne pouvais pas réaliser les souhaits de ce dernier, il me fallait lui dire! Et dans un rare élan de courage, je bégayais ma colère.

"Andjéty! Je ne suis pas t-ton jouet ! Je ne ferais de mal à p-personne, tu entends? A p-personne!"

Sans que je ne m'y attende, ce fut le blanc dans ma tête. Je me sentais de nouveau étrangement calme, comme si toute trace d'Andjéty avait disparu. Avais-je vraiment réussi à le calmer? Avais-je calmer le démon qui m'habitait? Un petit sourire de victoire vint orner mon visage, et je m'asseyais doucement sur mon lit. Cours répit que ce fut. Je sentais une gêne lointaine, à laquelle je décidais de ne pas prêter attention. M'imaginant une vie calme en maîtrisant ce démon, je ne vis rien arriver. La gêne devint plus présente, et je fus pris de migraines, et de nausées. J'avais mal, très mal. Une douleur inhumaine, qui me firent tomber à genoux Un cri de douleur sortit de mes dents serrées, et les larmes se mirent à couler toutes seules, tel le faible que j'étais.

*Pauvre petit insolent. Je t'ai déjà interdit de m'appeler par mon nom ! Personne n'en est digne. Tu n'es qu'un misérable moucheron que je me ferais le plaisir de tuer quand j'en aurais l'occasion ! Je suis ton Maître, tu entends? Et tu n'auras de cesse de souffrir tant que cela ne sera pas imprimé dans ton âme de vermine ! *

Je desserrai les dents comme je le pouvais sous la douleur. Moi, le petit souffre-douleur de l'école, avait cru pouvoir le contrôler? J'avais cru pouvoir exercer une once de pouvoir sur lui? J'avais eu tort. Il ne partirait jamais... Il me poursuivrait jusqu'à ma mort... Dans un dernier élan de courage, je parvins à prononcer avec tristesse quelques mots.

"Oui... Maître..."

Alors que mon corps prononçait ses mots, mon coeur saignait. Aurais-je des amis après cela? Qui voudrait d'un esclave, d'un rejeton comme moi? Le vis le décor tourner autour de moi, alors que mon cors heurtait le sol, m'empêchant de réfléchir plus à un éventuel futur. Ce fut le blanc total.