Les cours étaient passés, le temps de manger également, je venais de revenir de ma douche, j'étais donc assise en tailleur sur mon lit, dans un simple T-shirt large gris descendant jusqu'à mi-cuisse avec un chat noir centré sur ma poitrine. Sous ce simple tissu, un boxer de couleur charbon également, protégé mon intimité. Je secouai énergiquement mes cheveux mouillés avec la serviette qui était sur ma tête tout en chantant, en effet, le son de mon téléphone était poussé au maximum et même amplifié par une petite enceinte portable. La chanson qui passait était l'une de mes préférés : « Clint Eastwood » de Gorillaz évidemment, je la connaissais par cœur pouvant aussi bien rapper que chanter sans aucune difficulté. J'avais les yeux fermés car j'étais concentrée à la fois sur mon séchage capillaire mais également sur les paroles et surtout parce que j'essayais de ne pas faire attention à une certaine personne.


- Je ne suis pas toute seule puisque tu es là.

J'avais coupé momentanément mon chant pour répondre à Anubis qui resta un petit temps silencieux. Visiblement mes arguments ne pouvaient pas être contredis. Cette non réponse me fit esquisser un sourire amusé, je trouvais cela particulièrement adorable. Finissant de torturer ma chevelure, je me relevai pour venir poser ma serviette sur le dossier de la chaise de mon bureau, ainsi elle pourrait sécher en toute tranquillité, je me mis ensuite à mimer avec mes doigts les mouvements de basse du morceau, continuant à chanter par-dessus et ce au beau milieu de la pièce. Je devais avoir l'air un peu idiote mais c'était si libérateur de se lâcher ainsi sans gêne, sans aucune crainte du ridicule. Surtout que j'étais seule.

A l'instant où je pensai cela, j'entendis la porte dans mon dos s'ouvrir, j'eus tout juste le temps de me retourner en chantant la dernière phrase de la chanson. Je ne m’attendais à rien en particulier, pensant juste qu'il devait s'agir d'une prof ou d'une élève qui en avait marre de bruit, bien que le son n'était audible que dans les couloirs, les chambres étant particulièrement bien isolée. Enfin bref, peu importe, je souris en m'exclamant avant même de voir le visage de mon interlocutrice :
- Hey ! Sacré concert hein ? Que puis-je pour toi ?

Aujourd’hui, déménagement. Tu finis de ranger tes affaires dans ton gros sac. L’avantage, c’est que tu ne possède pas tant de trucs que ça, alors c’était assez vite fait. N’empêche… l’idée de devoir te trimbaler tes valises à travers les étages du pensionnat est plutôt déprimante. Tu soupire en jetant un dernier regard à la chambre maintenant vide. Elle fait un peu tristounette comme ça…

Bon. 113, c’est ça ? Espérons que le numéro ne te porte pas malheur. Tu attrapes les deux sacs et la valise et tu te mets en chemin vers ta future maison. T’as entendu dire que les M sont regroupés par deux. Tu ne t’inquiètes pas trop pour ça cela dit  - à part si la fille en question est imbuvable, ça devrait plutôt bien se passer. Et au pire, si ça ne passe vraiment pas…tu te débrouilleras pour qu’elle fasse ses bagages avant toi. Sur cette pensée amusante, tu arrives devant la porte. Pas d’erreur possible, c’est bien la 113. Tes yeux se posent sur le « L » blanc qui orne la porte.

« On dirait que ma future coloc aime faire dans le bling-bling… »

Tu regardes autour de toi mais le couloir est vide. Par contre, une de tes futures voisines abuse un peu sur la sono… Bah. Il n’est que huit heures et quelques, c’est pas bien grave.

Tu frappes trois coups sur la porte. Pas de réponse. En même temps, avec tout ce vacarme…

Tu pousses la porte, et c’est là que tu réalises que la musique vient de l’intérieur de ta chambre. Ah mince.

« Mauvaise pioche », grommelle Thémis. « Et regarde moi ce bazar. »

Heureusement, la mauvaise humeur de la divinité ne t’atteint pas. Et pour cause, tu es trop amusée par le spectacle qui s’offre à toi : un étranger en pleine démonstration de air-guitar qui chante à tue-tête sur la chanson de Gorillaz. D’ailleurs…tu fronces les yeux en détaillant la silhouette de l’inconnu qui se tient dos à toi. Tu te demandes brièvement s’il s’agit d’une fille ou d’un garçon avant que l’autre ne se retourne – bon, à en juger par ses formes, ça doit être une demoiselle.

Ah, c’est de loin le déménagement le plus drôle que tu aies jamais fait. Même pas le temps d’ébaucher un sourire que l’occupant de la pièce te lance avec un sourire :

« Hey ! Sacré concert hein ? Que puis-je pour toi ? »

Tu lui retournes un sourire malicieux sans dire un mot, et tu t’avances vers le lit libre. De toute évidence, c’est celui de droite. Difficile de s’y tromper quand tout le côté gauche de la pièce est tapissé de posters divers et variés – tu ne t’en plains pas, au contraire. Ça donne un peu de caractère à la chambre au moins. Arrivée au niveau du lit, tu poses tes bagages au sol et tu te laisses tomber en arrière sur le matelas.

« Ahh, c’est confortable quand même. C’est officiel : je reste habiter ici, mais seulement parce que le matelas est plus moelleux que dans ma chambre d’avant. »

« Tu parles d’une raison valable… »

Tu te relèves à contrecœur avant de te rappeler que la jeune fille t’avait posé une question. Tu lui réponds sans te départir de ton sourire:

« Ah, oui, tu peux continuer à chanter si tu veux hein ! M’appelle Merry, ‘suis ta nouvelle coloc. Toi ? »

Sans attendre sa réponse, tu attrapes un des sacs et tu commences à vider son contenu sur le lit à la recherche de tes draps. Ta Nintendo, des paires d’écouteurs, des chargeurs, quelques bouquins, un MP3 qui date probablement de l’âge de pierre, des cartouches de jeux, des cartes postales, etc… Pas ce que tu cherchais visiblement, mais parmi le bazar qui est à présent déversé sur ton matelas, tu tombes sur une tablette de chocolat. Tu prends une barre avant de tendre le reste à ta coloc.

« Tiens, t’en veux ? Ça sent bon ici, au fait », ajoutes-tu en humant l’odeur sucrée de la pièce. Tu t'interromps aussitôt quand ton regard se pose sur la housse de guitare qui traine dans un coin.

« Oh, tu joues de la guitare ? C'est une sèche ou une électrique ? » Tu t'approches de l'instrument en question en jetant un regard en coin à sa propriétaire.

Peut être que la présence d'un instrument potentiellement bruyant devrait t'inquiéter plus qu'autre chose. Pour l'instant ça t'intrigue seulement.

Je ne m'attendais pas à une telle visite, la personne en face de moi et une autre élève, vraiment mignonne en plus, je suppose que ce doit être mon jour de chance. Enfin c'est au départ ce que je me dis avant qu'elle ne snobe ma question pour aller s'installer sur le lit libre. Pas besoin d'être Sherlock pour comprendre qu'elle est donc ma nouvelle coloc', plutôt cool, depuis que je suis arrivée, je suis seule dans cette chambre, je n'espérai plus le jour où quelqu'un viendrait ramener sa jolie frimousse avec moi. Bref, elle finit par me sourire et me dire que je peux continuer de chanter, bien que la proposition est tentante, je préfère baisser le son pour mieux faire connaissance avec cette Miss.

Elle me dit se nommer Merry, et sans surprise être ma nouvelle coloc', je trouve ça mignon, du moins, ce prénom lui va très bien et est très jolie mais je ne fais aucune remarque là-dessus me contentant de sourire tout simplement. Elle me retourne ensuite la question afin que je décline mon identité, j'inspire, prête à répondre avec enthousiasme mais la voilà à nouveau qui se détourne de moi … Décidément elle est aussi énergique que moi, ça fait plaisir à voir … Je suppose. Enfin bref, sans me démonte, je pose mes mains sur mes hanches et m'exclame non sans une certaine fierté dans la voix :
- Tu peux m'appeler L.

Mais bon, elle semble plus occupée à vider une monticule d'affaire sur son lit, je regarde faire avec une certaine admiration curieuse, je n'ai jamais eu besoin de beaucoup d'affaire, n'étant pas très matérialiste mais elle … C'est une autre histoire. Enfin bon, elle me tend du chocolat, et complimente l'odeur de la pièce, c'est vrai que cela sent véritablement bon dans cette pièce mais c'est normal, j'ai tout fait pour. Quand on peut devenir un chacal on se rend compte que les odeurs ont une très grande importance en réalité. Bref, la remerciant pour la sucrerie, je l'observe s'avancer vers ma guitare d'un œil méfiant, je n'aime pas qu'on y touche bien que cela ne me dérange pas qu'on me pose des questions dessus, après tout je suis musicienne et une vraie passionnée.
- C'est une sèche, si tu veux je te jouerai un petit morceau à l'occasion.

Merry était particulièrement jolie et pleine de vie mais également très déstabilisante, ce qui n'était absolument pas pour me déplaire, j'aimais les personnes intéressantes mais Anubis ne semblait pas l'apprécier, du moins, j'entendais comme une sorte de grognement dans ma tête et j'étais sûre à deux cent pour cent que cela ne venait ni de moi ni de mon estomac. Pourquoi ? Parce que je n'étais plus seule dans la chambre ? Parce que je l'aimais bien ? La jalousie de ce Dieu pouvait parfois être un peu … Maladive. Mais bref, je m'assis sur mon lit en questionnant ma nouvelle colocataire dans un sourire amical :
- Raconte moi tout de toi, je veux tout savoir, tu as quel âge ? Et d'où viens-tu ?

Nous allions désormais vivre ensemble, autant que j'apprenne à la connaître, je pense que contre toute attente, cette soirée allait vite devenir une soirée pyjamas. Je bondis donc de mon matelas et ouvrit mon placard pour en sortir une boîte de cookies et une bouteille de chocolat froid que je tendis avec enthousiasme à ma camarade en lui demandant si elle en voulait aussi.

« Tu peux m'appeler L. »

Au moment où elle prononce ces mots, tu te retourne en haussant un sourcil pour voir si elle se moque de toi. Mais non, elle est tout à fait sérieuse – en fait, à voir la manière dont elle a mis les mains sur les hanches, tu aurais presque l’impression que ça lui apporte de la fierté. Tu relâches la pression en souriant.

« L ? Genre, le prénom Elle, ou, euh…comme dans Death Note ? » La naïveté de ta question t’arrache un léger éclat de rire. « Oublie cette question, en fait. C’est l’initiale de quoi du coup ?»

Alors que tu observes la guitare, tu remarque du coin de l’œil son regard méfiant.

« Tout doux ma grande, je vais pas la manger non plus… »

La suspicion semble s’évanouir dans ses yeux pour laisser place à un certain intérêt lorsqu’elle reprend la parole pour répondre à ta question. Tu accueilles sa proposition de te jouer un morceau un jour avec un sourire amusé. Décidément, cette cohabitation s’annonce prometteuse.

« Tu dis ça parce que vous prévoyez déjà de casser les oreilles au voisinage ? »

« Entre autres oui. »

Tu reportes ton attention sur elle pour couper court aux bavardages de Thémis. Elle s’asseoir sur son lit avant de lancer un véritable interrogatoire. L'enchaînement de questions t’arrache un nouvel éclat de rire. Tout en répondant à celles-ci, tu retournes t’affairer à défaire tes valises.

« Alors. J’ai seize ans, je suis du 15 novembre. T’es la première ici à qui je le dise, donc c’est à toi que reviens la responsabilité de m’organiser une fête surprise. Je te recommande de noter la da..»

Tu t’interromps au milieu de ta phrase pour faire un petit signe victorieux de la main : tu as enfin trouvé ta couette et tes draps. Tu les poses sur le lit en entreprenant de le débarrasser de tout ce que tu y avais déjà mis.

« Bref, j’dis ça pour plaisanter hein. Pour ce qui est de là où je viens… Je suis née vers Londres, mais on y est pas restés très longtemps après. En fait j’ai pas mal bougé dans le Royaume Uni quand j’étais gamine mais je m’en souviens moyen. A sept ans on a emménagé à Dublin et on s’est plus ou moins installés pour de bon. Je crois que je préférais quand même Londres mais bon, du haut de mes dix ans je pouvais pas trop imposer ma loi à mes parents hein ? »

Imposer ta loi…cette expression perd tout son sens maintenant que Thémis est dans ta tête hein ?

« Et à part ça, pas grand-chose à dire sur ma petite personne. Je suppose que mes centres d’intérêt peuvent se résumer à ça… »

Tu montres du menton le tas que tu tiens dans tes bras, où s’entremêlent câbles, écouteurs et consoles de jeu, avant de déposer le tout dans un des tiroirs du bureau et de le refermer. Tu poursuis en mettant les draps sur le lit :

« J’aime bien courir partout, et les sports en général aussi. Je sais que j’ai tendance à être assez bavarde donc dis moi si je parle trop. Je continuerai quand même mais peut être qu’avec un peu de chance la déesse qui squatte mon cerveau sera assez outrée pour me réprimander correctement.»

« C’est de moi que tu parle en ces termes si peu flatteurs ? »

« De qui d’autre tu voudrais que je parle ? »

Quand tu as fini, la demoiselle au look androgyne bondit littéralement de son lit pour se diriger vers le placard.

« Quelque chose me dit que tu n’es plus la seule hyperactive de la pièce. »

« Mais je ne suis pas hyperactive… »

Tu dépose la couette sur ton lit avant de ramener ton attention à ta coloc. Ton regard s’illumine lorsque tu remarques la boîte de cookies qu’elle tient dans ses mains. Tu acceptes volontiers lorsqu’elle t’en propose. Le cookie calé entre tes dents, tu continues à vider tes bagages ; cette fois-ci, c’est tes vêtements que tu déplaces peu à peu dans ton armoire.

« Assez parlé de moi maintenant. Et toi alors, t’es ici depuis longtemps ? Et puis, vu qu’on est amenées à vivre ensemble…y a des trucs gênants sur toi que je devrais savoir ? Oh, et j’ai comme le sentiment que je vais le découvrir bien assez vite mais t’écoutes quoi comme musique ? T’as une tête de rockeuse mais faut pas se fier aux apparences hein ? Enfin anyway … »

Tu fermes le placard et tu t’adosses à la porte en attendant une réponse de ta coloc.

Elle était marrante, du moins, je n'ai pas plus m'empêcher de rire devant ses questions, mais puisqu'elle voulait savoir mon véritable nom, je ne pouvais pas lui mentir, surtout que nous allions partager cette chambre, autant donc qu'elle sache tout de moi. D'un air plus sage, je répondis de nouveau :
- C'est le diminutif de Lucylia mais je préfère vraiment qu'on m'appelle L.

Lucylia … Ma mère m'appelait comme cela, ça aurait été trop difficile pour moi qu'on continuait à m'appeler ainsi, quand mon frère me regardait dans les yeux avec son franc sourire et ses yeux amplis de fierté à mon égard il me nommait L et cela gonflait mon cœur de bonheur. Il m'aurait sûrement appelé ainsi, si j'avais été sa fille et cela me convenait parfaitement, je ne le voyais pas comme mon second père, juste qu'à mes yeux, il était la seule famille qui me restait. Enfin bref, Merry semblait beaucoup apprécier mon instrument me faisant même une petite remarque amicale quand elle remarqua que je n'étais pas tranquille.

Je riais un peu, j'avoue que je ne devrais pas être si tendu que quelqu'un s'approche de ma guitare mais que voulez-vous, il s'agit de mon précieux trésor. En tout cas, elle était d'accord pour m'écouter jouer, c'était encourageant. Je suppose de ce fait qu'elle ne râlera pas si je me permets de répéter un peu dans la chambre, d'ailleurs j'aurais peut-être dû garder ma basse dans la chambre également plutôt qu'au club de musique. Je ne sais pas, cela prenait un peu de place, il faut l'avouer, deux instruments de musique auraient peut-être fait un peu trop. Mais au moins, je pourrais me servir de ma guitare pour animer sa fête d'anniversaire, du moins, elle semblait dire que j'étais en charge de lui organiser une surprise puisque nous étions désormais coloc', aucun problème pour moi ! J'adore faire la fête de toute façon.


Ouais enfin si je l'écoutais, je ne ferais quasiment plus rien de ma vie. Londres et Dublin ? J'avais vaguement visité ces villes avec le groupe de mon aîné, c'était des coins plutôt agréable à vivre bien que rien ne surpasserait Manchester dans mon cœur. Pour les centres d'intérêt par contre, je ne suis pas sûre que nous ayons beaucoup de choses en commun, même si comme tous les jeunes qui se respectent tu t'y connais en matière de technologie, moi c'est plutôt dans un sens commercial.


Oui en gros, par contre le sport ça c'est mon rayon ! Puis bon que ma coloc' soit une bavarde, c'est pas vraiment pour me déplaire, peut-être que le son de sa voix finira par couvrir celle d'Anubis, qui sait, on peut toujours rêver. Mais du coup j'ai après une info intéressante, elle était habitée par une déesse, c'était bon à savoir, enfin, je veux dire, j'ai bien compris que c'était un peu mal vu de demander directement à quelqu'un qui était le Dieu ou la Déesse qui l'habitait, du coup il fallait jouer aux devinettes avec les autres. C'était un peu chiant d'une certaine manière … Je suppose. Enfin bref, je me sers un verre de chocolat froid, pose la bouteille sur le sol à côté de mon lit et me sert un cookie que je commence à tremper dans le liquide pendant que Merry me demande de lui parler de ma petite personne. Je croque dans la délicieuse pâtisserie d'un air pensif puis répond avec un grand sourire :
- Je suis là depuis fin Novembre je crois, et j'écoute effectivement du rock mais aussi du punk, du progressif, de l'expérimental et du folk.

Des trucs gênants hein ?


J'émis un petit rire amusé.
- Bof non, je suis pas quelqu'un de compliqué à vivre, c'est surtout le squatter dans ma tête qui est rabat-joie.


Je crois que je l'ai vexé.

« Bof non, je suis pas quelqu'un de compliqué à vivre, c'est surtout le squatter dans ma tête qui est rabat-joie. »

Le squatteur… Donc un dieu, à priori. Tu aurais bien aimé trouver un moyen de deviner son identité, mais tes connaissances en mythologie laissent vraiment à désirer, alors à part si elle est possédée par Zeus ou Poséidon, tu risques pas de trouver. Un rabat-joie ? A part Thémis, ça ne t’évoque pas grand-chose côté mythologie. Tant pis, tu joueras les détectives en herbe une prochaine fois, quand t’auras plus d’informations à son sujet. En attendant… si tu veux qu’elle lâche des indices au sujet de sa déité, il faut probablement que tu en fasses de même.

« Sinon, tu peux juste laisser tomber ta curiosité déplacée, qui ne mènera d'ailleurs à rien, et… »

« Et revenir sur le droit chemin de l’ordre et de la Justice ? Nope, thanks. »

« J’allais pas dire ça. »

« Mais tu ne penses pas le contraire pour autant, non ? »

« … »

Tu lèves les yeux au ciel avant de reprendre à l’attention de L.

« Ah, les deux s’entendraient probablement très bien alors. Madame vient justement de me faire la leçon parce que le simple fait que je respire est un trouble à l’ordre de l’univers, apparemment. »

«  C’est pas comme ça que je l’ai formulé. Pas faux, cela dit. »

« Merci pour ce soutien incroyable. »

« Bref bref », reprends-tu à voix haute, soucieuse de combler le silence qui vient de s’installer. Tu lances un regard à ta montre. Déjà neuf heures ? « J’espère qu’il te restait pas de travail ou je ne sais quoi à faire, au fait. »

Vu la manière dont tu l’as surprise en rentrant dans la chambre tu en doutes, mais sait-on jamais. Au pire, tu pourras toujours te réfugier silencieusement sous ta couette avec ta DS pour la laisser travailler tranquille.

« Ou plutôt faire tes devoirs toi aussi. Il me semble que tu avais des exercices de maths pour demain. »

« Mphfr. J’improviserai si je passe au tableau et ça ira très bien. »

Ce qui te fait penser, tu ne sais même pas en quel niveau elle est. Tu lui poses aussitôt la question pour remédier à ce problème :

« D’ailleurs, t’es en quelle classe ? »

Probablement pas en première, tu t’en souviendrais. Faut dire qu’elle est plutôt marquante ta nouvelle coloc. Tu esquisses un sourire en songeant que cette cohabitation risque de ne pas être de tout repos. Oui, tu es contente d’être tombée ici. Surtout que pour ce que tu en as vu, Lucylia et toi devriez bien vous entendre.
Reste plus qu’à faire plus ample connaissance…

« Bon. On passe aux choses sérieuses ? »

Tu te redresse avant de t’écarter de l’armoire où tu étais adossée. D’un léger coup de pied, tu envoies glisser ta valise maintenant vide sous le lit, geste symbolique pour signifier à ta voisine que ton installation est bel et bien terminée. Puis tu t’avances vers elle, un air exagérément sérieux plaqué sur ton visage. Tu attrapes un cookie avant de t’installer en tailleur sur son lit. Tout en plongeant ton regard concentré dans le sien, tu trempes le cookie dans son verre de chocolat sans la moindre gêne.

« Bon alors. Parle-moi un peu de toi, maintenant. Pour de vrai, je veux dire ! T’as un copain ? Ou une copine ? Quelqu’un en vue peut être ? Si tu veux ramener des gens, enfin, une personne ça suffit, quoi que tu fais ce que tu veux quoi…Enfin tu vois ce que je veux dire, je peux me débrouiller pour squatter ailleurs le temps d’une nuit quoi. Et sinon, t’es du genre à faire beaucoup de bêtises ? J’espère que je ne suis pas tombée sur une enfant sage… Allez, c’est quoi ta plus grosse connerie ? »

Tu accompagnes la remarque d’un sourire en coin un peu provocateur, quoi qu’amical. Eh ouais, elle a peut être réussi à esquiver ta question sur les trucs gênants tout à l’heure mais elle ne s’en tirera pas comme ça éternellement. Un sourire de défi se dessine sur tes lèvres alors que dans ta tête, Thémis pousse un soupir de consternation comme pour te reprocher ton indiscrétion et ton manque total de délicatesse. Bien décidée à en apprendre un peu plus sur celle avec qui tu va partager la chambre mais surtout à trouver une bonne excuse pour ne pas travailler, tu poursuis:

« Bon, j'ai une idée ! Une question, chacune son tour. Si tu réponds pas, un gage pour plus tard. Ça te va ? Je te laisse commencer !»

Merry aussi partageait son être avec une divinité compliquée, c'était un point commun qui ne manquerait certainement pas de nous rapprocher d'avantage. Du moins c'est ce que je pensais, surtout que jusqu'à présent, j'avais toujours eu cette chambre pour moi toute seule et la solitude, c'était pas exactement mon truc, bon après dire que j'étais seule serait un peu hypocrite car il y a lui, en permanence, quoi que je fasse, quoi que je veuille, lui il ne me quitte pas, jamais.


Bonne question. Je ne pouvais pas dire que ça me déplaisait, certes il avait ses mauvais côtés mais bon, c'était pas non plus un monstre et puis j'aimais la tonalité de sa voix, je me sentais si bien avec cette présence en permanence à mes côtés. Mais maintenant il y avait une fille ! J'allais enfin pouvoir converser normalement avec quelqu'un, pas juste débattre sur si quelque chose est plus ou moins déprimante et ça c'était le Paradis !

Ha ha, il n'est pas prêt à me lâcher avec cette histoire. Enfin bon, la voix de ma camarade s'élève une fois de plus, brisant ce silence qui s'était installée, elle regarde sa montre et me questionne, je souris avec amusement en buvant une gorgée de mon délicieux breuvage sucrée puis m'exprime sans pression aucune.
- Je suis plutôt du genre à faire mes devoirs quelques minutes avant que le cour ne commence.


Anubis soupire et soupire mais que voulez-vous, je dois être un génie ! Ou quelque chose comme ça … Une nouvelle interrogation m'extirpe de mes lubies. C'est vrai ça en quelle classe elle est c'te demoiselle ? Toute petite et si frêle, on dirait un peu une collégienne mais bon si elle est dans ma chambre on ne doit pas avoir une grande différence d'âge … Je suppose.
- Je suis en terminale, et toi ?

Autant lui retourner la question pour en avoir le coeur net, je n'aime pas rester dans le flou quand il s'agit d'une information aussi cruciale !


Aïe touchée ha ha ~ Mais l'heure n'est déjà plus à la plaisanterie, voilà que Merry alourdit l'atmosphère en prenant un air sérieux, s'approchant de moi pour venir s'installer sur mon lit en volant un cookie qu'elle trempe même dans ma tasse. Je ne la quitte pas des yeux une seule seconde, l'observant faire tel un jeune animal emplit de curiosité, elle m'assomme par la suite sous une nuée de questions. Bien que je serais ravie de répondre à cette interrogation la longueur de ce monologue me donne un peu le tournis, toute fois elle se reprend pour me proposer un petit jeu afin qu'on apprenne à se connaître. Après quelques secondes, je ne peux plus me retenir et rit aux éclats pendant bien une minute, allant jusqu'à me tenir le ventre, je pose ensuite ma main sur la tête de ma colocataire et lui ébouriffe doucement les cheveux en m'exclamant avec bonheur :
- Je t'aime bien toi tu sais.

Puis je retire ma main, venant me racler la gorge, c'est à mon tour de prendre un air parfaitement solennel. Je la fixe ensuite droit dans les yeux, le visage fermé, le regard perçant, me rapprochant lentement d'elle jusqu'à être à quelques centimètres de son visage puis lui demande dans le plus grand des calmes :
- C'est quoi ton tour de poitrine ?


Soupire Anubis pendant qu'intérieurement je ris à nouveau aux éclats.