Je ne vais pas vous mentir, je suis plutot invivable! Et j'aime bien être ainsi. Dotée d'un talent pour les maths certain (je pourrais chiffrer toute votre vie et mettre sous équations vos moindres gestes si je le voulais), libre de faire ce qui me plait sans être condamnable et un esprit créatif pas spécialement bénéfique pour tout le monde, il ne me faut pas grand chose pour transformer la vie de quelqu'un en Enfer! Cela ne veut pas dire que je suis associable, bien au contraire, la compagnie m'a toujours été bénéfique et je suis plutot bonne conseillère. Mais faut être méritant pour ça. Voyez-vous, j'aime la perfection, que ce soit une personne, un comportement ou tout simplement le vent. Il parait que je tiens ça de mon père, directeur d'une compagnie mondiale qui rêverait de voir sa fille avocate, si seulement il savait... Mais il le sait déjà, et ça fait maintenant 3 ans qu'on ne se parle plus. Il m'a peut-être renié ou alors il m'a oublié, sincèrement, je m'en fiche, de lui, à part rancœur et indifférence, je n'ai pas acquis grand chose! Ouais, je le hais, étonnant pas vrai? Mais ne vous inquiétez pas, tout les adultes ont le droit au bonnet d'ane avec moi.

Tous sauf Odin, pourtant, même s'il est sympa aujourd'hui, je peux vous dire qu'il était insupportable il y a deux ans!
Bon, je ne dois pas lui rendre la vie facile non plus. Les problèmes, je les résouts généralement avec mes poings, pas avec les mots, pas de façon diplomatique j'entends par là. Oh bien sûr, en deux ans, j'ai grandi (et pas qu'en formes), mais rien ne vaut une machoire déboitée ou un coup de baton bien placé... Et puis, il faut bien admettre que la société ne me laisse aucun répit!

Il y a pourtant une différence entre les démons et les roux, mais on dirait que les gens sont aveugles, ou idiots! 100% naturels en plus, je suis la seule dans la famille à porter aussi bien le rouge avec ma tignasse couleur "feu". Je ne les attache que pour les grandes occasions, deux ou trois fois par an en somme, épais, ils sont aussi indomptables que des cheveux fins, même après une douche. Petite, on me les coupait court pour éviter le problème, ainsi, un coup de brosse suffisait, et encore. Mais depuis ma possession, j'ai cessé d'aller chez le coiffeur, coupant par moi-même quelques mèches ci et là qui risquent de gacher ma vue. Ma vue. Mes yeux. C'est peut-être la première chose que les gens remarquent chez moi, oubliant ma poitrine et mon 1mètre 60. Tout les deux bleus, le gauche est plus clair, ce qui est particulier pour de l’hétérochromie, des yeux vairons si vous préférez, l'autre tend plutot vers du turquoise. J'ai naturellement une expression de dureté à cause de cet oeil glacial, même avec un sourire sur les lèvres! Généralement, ça fait peur aux jeunes.

... Sérieusement, en 3 ans, vous ne me connaissez pas? Même Odin me connait mieux que vous, c'est dingue ça! En même temps, je ne parle pas de ma vie, elle est barbante à souhait... C'est comme ça quand on vit dans l'ombre de ses parents, on fait tache et on attend de la voir briller pour enfin dire "ah mais oui, je la connais! C'est la fille du patron de Truc-muche!"... Tss j'ai horreur de cette pancarte "Fille à papa"...

Comme je vous l'ai dit, mon père est le boss d'une compagnie mondiale, celui à qui on lèche les souliers pour avoir une promo ou tout simplement son attention. Je n'avais pas à le faire pour ma part, je n'existais pas à ses yeux. Je n'en étais pas digne et le fait que maman se soit barrée alors que je n'avais que 6 ans n'avait pas arrangé les choses! Elle était restée pour moi pendant tout ce temps, uniquement par amour pour le bébé à touffe rousse qu'elle avait réussi à mettre au monde sans trop de problèmes. Mes parents s'aimaient-ils? Aucune idée et je n'y ai pas vraiment réfléchi, j'étais bien trop occupée à chercher un regard de mon paternel! Au début, je me contentais de faire classique, bosser dur, ramener des bonnes notes, être une élève modèle quoi. On ne pouvait rien me reprocher, j'étais la chouchoute des profs, l'enfant que tout les parents rêvaient d'avoir et la chose détestable des autres. Je n'hésitais pas à rapporter tout ce que je voyais, il était difficile de racketter ou de se battre sans que je ne le sache! Mais cela ne semblait pas suffire à Père qui enchainait rendez-vous sur rendez-vous, s'absentant de la maison suffisamment longtemps pour encore plus m'oublier, payant une nounou sans en savoir la raison sans doute. Pour lui, je n'étais pas morte, je n'existais juste pas, un fantôme, c'est tout. mais quand on est petit, on comprend pas vraiment ça, on espère comme un idiot qu'il tourne un jour la tête vers nous et qu'un sourire illumine ses yeux!

Et cette innocence m'a couté très cher.

Arrivée au collège, ma vie devint un véritable Enfer, Hadès n'avait plus qu'à se rhabiller, les humains sont décidément bien plus imaginatifs que lui pour tourmenter les siens! Pendant les vacances, alors que j'avais continué à m'instruire, les autres avaient gagné en taille, en force, et en méchanceté... Lors des premiers jours, tout se passait pour le mieux, je faisais le bonheur des professeurs qui voyaient en moi une future ingénieure ou une scientifique tant je me débrouillais en maths et en sciences, ignorant le danger que pouvait représenter mes camarades. Puis, le jour des élections des délégués de classe, je reçus le premier coup de poignard dans le dos. Des affiches de moi mimant quelqu'un qui fume photoshopé étaient placardées partout dans l'établissement, même dans les toilettes. La scène, elle avait eu lieu lors de la rentrée, pendant les présentations, c'était un jeu idiot qu'avait organisé le prof pour qu'on s'amuse tout en apprenant à se connaitre! On devait imiter un de ses parents et les autres deviner après, simple comme bonjour, et comme mon père est un gros fumeur, je l'avais mimé ainsi, deux doigts sur les lèvres, les yeux mi-clos. Sauf que là, on me voyait avec des cernes, un gros pétard en bouche et un garrot au bras gauche, les mots "elle se drogue pour réussir, la s*****!" inscrits en rouge... Toute la matinée, j'essuyais moquerie et mépris sans rien dire, trop choquée pour oser me défendre. On m'avait finalement convoqué chez le directeur, avec papa. Papa qui me regardait pour la première fois de ma vie. Avec froideur et dégout... L'affaire fut rapidement bouclée et moi innocentée, mais ça, les autres s'en foutaient, et papa avait décidé de me prendre en main.

Pendant 4 ans, j'avais changé, m'isolant des autres, cessant de parler, piégée par le cycle vicieux que vit un souffre-douleur. Si j'avais de bonnes notes, je me prenais des coups de la part des élèves, petits comme grands, si j'en apportais des mauvaises, c'était mon père qui sanctionnait. Mais jamais je n'avais pleuré, même quand on m'avait fait le coup de la tête dans les toilettes ou les fringues volés en cours de sport pendant la douche. J'étais toujours sortie fière comme un coq, le regard froid et impassible, les jugeant avec indifférence. Silencieuse sur mes tourments, l'administration pensait que je le faisais exprès, faisant pleuvoir les heures de colle, ce qui n'arrangeait guère mon attitude et encore moins l'humeur de papa. Et pendant ces heures de solitude, je nourrissais ma haine envers eux, jurant de leur faire payer tout ça. Le sang coula alors. Le dernier jour de ma Troisième, alors qu'on nous remettait nos diplômes. Je les avais attendu à la sortie, un coquard à l’œil droit, déterminée à faire ce que je voulais. Résultat? Un nez cassé, trois entorses au genou, un bras cassé, une montagne d'ecchymoses et des cotes fêlées. Ils avaient eu que ce qu'ils méritaient, eux les meneurs de ma persécution. En 4 ans, je n'avais pas que forgé mon mental, j'avais aussi travaillé mon corps, acceptant la douleur comme une bénédiction, un petit pas vers mon but.

De toute façon je n'allais plus les revoir. Ni mon père. Il ne le savait pas encore mais j'avais rempli le dossier d'inscription pour une pension prestigieuse dont le niveau était fort haut et purement normal pour moi, j'avais reçu une lettre m'invitant à l'intégrer. C'est bien la première fois que j'en entends parler d'ailleurs, mais bon, les écoles privées, elles sont aussi discrètes alors pas de quoi s'inquiéter! A peine rentrée à la maison, les mains rougies par les coups que j'avais donné, diplôme en poche, j'avais préparé mon sac et pris l'argent que cachait papa sous son lit, une petite fortune pour une ado de mon age! J'ai pris le bus pour ne pas me faire remarquer, direction Connemara! Là bas, je n'ai pas eu trop de problèmes pour trouver le pensionnat et de l'intégrer pour passer ma Seconde. Mais ma période "Collège" était profondément ancrée en moi, aussi étais-je plutôt ingérable, bien que bonne élève, tel un prédateur, je n'hésitais pas à mordre. Et j'aimais ça! J'ai pourtant réussi à me faire des amis, de vrais, pas des lèches-bottes capables de vous trahir au moindre coup de vent... C'est alors qu'on me convoqua à la rentrée de ma Première. Comme ça, sans raison! Ou plutôt si, c'était pour ma Possession. Un jour aussi beau que douloureux mais là encore, j'en étais sortie la tête haute et le regard flamboyant... Avec un passage à l'infirmerie d'une semaine.

J'étais devenue l'hôte d'Odin. Une expérience troublante que je vis depuis maintenant 2 ans, à tout casser. Ne rien cacher à un dieu millénaire qui voit les mortels comme des serviteurs bons à les craindre et à prier, plutot étrange pas vrai? Vous ne me croirez pas si je vous dis qu'il a changé! Au début, c'était compliqué, faut dire que j'avais plutot mal supporté le fait que je devais partager mon corps avec un inconnu, inconnu qui pouvait lire tout ce que contenait ma caboche. Des claques et des piques, on s'en est envoyé des bonnes dans les premiers mois à suivre la Possession mais depuis, il s'est grandement améliorer! Bon, il a encore du mal à vivre dans Midgard et ne sait toujours pas comment il devra réagir en présence de certains membres de son panthéon mais on trouve toujours une issue dans nos galères!

Ah la la, Odin... Que dire de plus que vous savez déjà? Fils des géants Bor et Bestia, il fut l'un des premiers représentant des Ases avec ses frères Vili et Vé. Il a diverses fonctions, étant le chef du panthéon, tel que celui de psychopompe, de dieu de la victoire et du savoir mais aussi de la magie, de la poésie, des prophéties, de la guerre et de la chasse. Eh oui! Ce gros nounours s'occupe d'arts délicats, impressionnant n'est ce pas? Mais ce n'est rien comparé au reste et malgré toutes ces responsabilités, il était avant tout le dieu des guerriers et le Maitre du Valhalla, étant le seul à permettre aux guerriers les plus valeureux d'entrer chez lui en envoyant ses fameuses Valkyries vers l'Elu mort au combat. Il a aussi été l'inventeur de la Seydr avec Freyja, une magie pratiquée par les femmes à cause de sa complexité et sa pratique fatigante. Comme les Nornes, elles pouvaient voir l'avenir dans des runes et par transes ainsi que se transformer en animal. Odin était un maitre dans ce domaine, ce qui n'est pas étonnant vu que c'est le dieu de la magie!

Réputé pour avoir milles surnoms dans les 9 Mondes, on le connait surtout pour les objets et les compagnons qu'il ne cesse de garder auprès de lui, et d'être le créateur du monde des humains, des elfes et des nains, Midgard! Difficile de voir Odin sur les gravures sans sa lance Gungnir "celle qui atteint toujours sa cible", son destrier Sleipnir, fils de Loki, "le plus grand coursier à 8 pattes du panthéon", ses loups Geri et Freki, représentants des fonctions divines de la Mort et de la Guerre -car c'est connu, les loups, ça fait le nettoyage après la bataille-, et ses corbeaux Hungin et Munin, les "balances" du panthéon -avec eux, impossible de cacher ses infidélités! Et quand il n'est pas à cheval, il est sur son trône, Hlidskjalf, d'où il pouvait voir tout dans les 9 mondes -très utiles les corbeaux quand on a déjà ça, mais passons.

En deux ans, on en apprend des choses sur son voisin de cervelle et je peux vous dire qu'il en a fait des choses! A peine né et capable de tenir une arme qu'il fit la guerre à des géants de glace avec ses frères. Bien qu'étant mortels et en sous-nombres (3 contre des milliers), ils étaient dotés d'une force colossale et leurs blessures disparaissaient à vu d’œil. Ils ont quand même gagné au bout d'un moment, tuant le géant originel, Ymir, qui noya ses congénères avec un raz de marée sanglant -il devait être vachement grand!, sauf deux qui se sont cachés dans sa carcasse alors déjà en pleine terraformation par les trois Ases. De cette envie de créer quelque chose au lieu de détruire est née un univers, les 9 mondes, dont le notre, Midgard. Et enfin ils nous ont créé avec des troncs d'arbres. D'ailleurs, la femme a été faite avec de l'orme et l'homme avec de Frêne, vous ne voyez pas où je veux en venir? L'orme symbolise la justice, le croisement entre les mondes et le temps, l'hybride, la vie, les songes et la régénération. Le frêne est lié à la solidité, la sagesse, la fécondité, le bonheur et l'immortalité. Des symboles complémentaires vous ne trouvez pas? (Si vous dites oui, je vous donne un cookie!)

Bien sûr, comme tout dieux qui se respectent, il a eu des aventures intimes! Combien? Oh, 2 épouses, enfin ça, c'est ce qu'il dit mais je pense qu'il doit avoir quelques amantes à coté aussi (3 en fait, oui, j'ai cherché de mon coté vu qu'il ne me disait rien!). Il a aussi 9 enfants, 10 si on compte Loki, qui est probablement le fils qu'Odin paterne le plus. Pourquoi? Les raisons sont diverses et chacune valable. Comme le fait qu'il fasse beaucoup trop de bêtises pour le pauvre petit coeur de son père. Je ne vais pas vous parler des autres rejetons, déjà car... vous vous en fichez probablement et parce que c'est pas l'endroit idéal pour ça!

Odin... n'est pas le bon dieux sage qu'on dit dans les vieux écrits. Il n'y a qu'à voir les sanctions qu'il a imposé à loki et ses sales tours aux midgardiens et géants de glace. Hypocrite, doté d'un égo surdimensionné, têtu et aussi étroit d'esprit qu'un escargot, autant vous dire que notre coexistence était invivable. Surtout pour lui, essayez d'imaginer que vous être un dieu et que vous vous retrouvez coincé dans le corps d'un puceron, ça fait mal! Mais ça, c'était il y a 2 ans. Ouais, le grand-père a évolué, il a fini par ouvrir les yeux, à murir, à accepter de manger du poulet et de boire de l'eau, de vivre dans le corps d'une jeunette et d'arrêter de jouer les mères poules de service, sauf avec moi -fallait bien qu'il y ait une magouille! Il est le dieu du savoir, le Grand Sage, le Conseil Judicieux, le Père du Monde, et il était temps qu'il endosse son rôle avec justesse et bonté car franchement, il commençait à me taper sur les nerfs au bout d'un moment! Bon, je dois bien avouer qu'il a su me sortir de l'eau malgré mon comportement belliqueux, moi aussi j'ai muri, même s'il m'arrive encore de lancer des piques, souvent même. Entre nous, ce n'est pas le grand amour, c'est une relation durable et forte, de renfermés, on est devenus de bons amis, et c'est tout ce qui compte dans cet enfer qu'est ce pensionnat!

Comment fait-on pour ne pas nous entretuer si on est si invivable pour chacun que ça? Bah déjà... Odin est pas bête, il sait que s'il m'annihile, il retournera dans la salle 3.4, et puis on a notre propre jardin secret dans ma tête. Il n'y a pas que les bouddhistes ou les pratiquants du yoga qui méditent, chez les Ases, ça se faisaient aussi, surtout pour utiliser la Seydr. Bon, n'étant pas une déesse, je ne pars pas en transe ni ne vois l'avenir dans je ne sais quoi de divin, mais cela est fortement apaisant, et je peux faire cela même en marchant. C'est un lieu neutre dans mon crane où on peut se retrouver sans soucis, généralement il représente Asgard ou un autre monde, Odin a une très bonne imagination, tout comme moi. Ici, on peut discuter sans s'emporter, sympa non? Bien sûr, si je le fais en marchant, je ne vois pas où je vais puisque que je suis concentrée sur mon camarade spirituel et donc, bonjour les murs et les poteaux!

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