Le 1er juillet, 23h30
Sur les indications du Professeur D'Arcy, le cortège avait établit son campement de fortune au beau milieu de nulle part. L'homme louche qui ne cessait d'apparaitre et de disparaitre avait fait surgir le chaudron mythique de Diwrnach pour nourrir le groupe, éreinté par cette journée riche en aventures. Enja ne se priva pas de manger, elle en ressentait un besoin extrême. Puis vint le moment où les élèves commencèrent un à un à sombrer dans le sommeil.

Etant professeure, Enja ne devait pas trop dormir. De toute façon, elle n'était pas sure d'y arriver. Elle en profita alors pour faire le point sur ce qu'elle avait pu récupérer de ses affaires. Son sac à main avait eu la gentillesse de rester à ses côtés tout le voyage, et elle avait réussi à retrouver quelques affaires dans les eaux du Nil : deux shorts, un débardeur, et trois paires de chaussettes. C'était déjà ça. Elle plia le tout, maintenant sec après avoir passé quelques dizaines de minutes près du feu, et les rangea dans son sac à main.

Profitant du calme régnant, Enja observa les élèves, essayant de deviner leur âge ou leur classe. Elle s'arrêta sur le jeune homme qui était tombé à l'eau plus tôt dans la journée. Il semblait plus vieux que la majorité des élèves, Enja le plaçait soit en Terminale, soit, plus surement, dans ses premières années d'université. Il avait semblé quelque peu secoué en arrivant sur la rive du Nil, et n'avait pas pipé mot depuis. Il avait semblé léthargique tout le long de la marche à pied. A l'arrivée du chaudron, il n'attendit pas longtemps pour dévorer la nourriture qui lui était attribuée, et s'était endormi rapidement, roulé en boule dans un coin, avec ce qui lui restait de ses bagages dans les bras.

Chaleur insupportable. Vase désagréable. Faim inaltérable. Et vous osez vous plaindre, alors que je suis dans ce fichu désert, couvert de vase séchée, les vêtements aussi agréable que de la pierre ! Je ne saurais même pas dire depuis combien de temps nous marchons, ce que je sais par contre c’est que dans mon état, je ne saurais en supporter beaucoup plus, surtout avec les piaillements de la gamine enfermée dans ma tête. La nausée est encore présente, de plus qu’une soif que je ne peux absolument pas étancher. L’eau du Nil a violemment irrité ma gorge alors même que je venais de verser le contenu de mon estomac. Exceptionnel comme sensation, j’espère que vous connaîtrez ça un jour ! Et ce mal de tête… oh ce mal de tête, qu’il m’énerve ! Au moins autant que les paroles d’Eithne.

Le jeune homme, maintenant bien réveillé, se leva. Il semblait chercher ses mots pour répondre à Enja. Il ne semblait pas très à l'aise, et Enja le comprenait. Elle n'était pas des plus sociables, mais ses voyages autour du monde l'avait forcée à aller vers les autres, et à communiquer. Le temps que le jeune homme se décide à prendre la parole, Enja l'observa un peu plus.

Le jeune homme se démarquait des autres élèves par de très longs cheveux noirs ainsi qu'une barbe et une moustache de la même couleur. Il dépassait Enja de quelques centimètres, et sa carrure laissait penser qu'il s'était musclé d'une façon ou d'une autre. Enja ne savait pas encore quoi penser de lui, et le fait qu'il avait risqué la noyade la veille ne le laissait surement pas dans un état normal.

Osant enfin prendre la parole, le jeune homme parvint enfin à prononcer un mot :

- Bonjour

Sur sa lancée, et sans regarder Enja, il continua :

- Je… je vais bien. J’ai juste fait un rêve mais ce n’est rien, j’ai l’habitude. Nul besoin de s’inquiéter. Qui êtes-vous ? Je ne vous ai jamais vu avant et bien que vous ne semblez pas plus âgé que je ne le suis, j’ai le sentiment que vous n’êtes pas une étudiante. Votre façon de me couver me met mal à l’aise, je ne suis pas quelqu’un de sociable. D’ailleurs, que suis-je si ce n’est un pauvre bougre hanté par les flots ?!

Au fur et à mesure qu'il parlait, Enja et Idunn s'interrogèrent sur la véracité du discours :

*Tu crois vraiment qu'il peut aller bien après hier ?*
*Je sais pas, ça me paraît bizarre, ça doit être un choc quand même*
*Je suis d'accord. Bon, on verra bien comment ça évolue...*

Idunn et Enja s'accordèrent sur ce point, et cette dernière décida de se présenter, rattrapant le jeune barbu qui avait acceléré. Après tout, elle était encore inconnue aux yeux de la plupart des élèves.

- Je suis Enja Yngvisdottir, la nouvelle professeure de mythologie du pensionnat. Je suis désolée de t'avoir mis mal à l'aise, mais ma responsabilité d'encadrante fait que je suis obligée de vérifier que tout va bien !

Enja esquissa un sourire, essayant de rassurer le jeune homme d'une des seules façon à sa disposition. Essayant de le faire penser à autre chose qu'a sa mésaventure de la veille, elle enchaina sur une question :

- Alors, comme ça tu es étudiant ? Tu as choisi quel domaine ?

Enja eut à peine fini sa question qu'ils arrivèrent à l'entrée de village. Elle resta bouche bée devant ce mélange de simplicité et de beauté. Elle était venue plusieurs fois en Egypte pour étudier la mythologie, mais être à l'époque où celle-ci avait été pratiquée la rendait euphorique. Ses yeux se baladaient d'un côté à l'autre de la rue principale dans laquelle le groupe marchait à la suite de l'homme venu plus tôt à leur rencontre. Il arrivèrent sur la place centrale, et Enja put découvrir au fond du village, se dressant au dessus de toutes les petites maisons, le temple principal du village. Enja en fit son objectif du voyage. Elle devait rentrer dans ce temple. Elle devait parler avec les religieux du village, les croyants. Comprendre leur vision de la mythologie. Connaître leur dieu principal. En apprendre toujours plus. C'était une chance plus qu'inouîe pour elle. Un miracle serait peut-être le mot le plus juste. Elle aurait presque envie de remercier chaleureusement le dégénéré qui avait pris les commandes de l'avion la veille. Mais il ne fallait pas pousser, il avait quand même faillit les faire tuer.

Elle se remit à observer le groupe, et parmi les élèves, les réactions différaient du tout au tout. Certains semblaient à peine enthousiastes, tandis que d'autres, à l'image du jeune homme barbu, semblait fascinés par les environs. Le mot fasciné paraissait même faible pour ce dernier, chez qui un changement semblait s'être soudainement opéré à l'entrée du village. Ses traits s'étaient décrispés, et il semblait avide de découvrir les moindres recoins du village. Enja le comprenait, partageant en grande partie ce sentiment. Le jeune homme affirma même :

- Je me plais déjà ici, ces vacances vont finalement être exceptionnelles !

Attendant toujours la réponse à sa question, Enja se perdit dans la contemplation de ce petit trésor de l'antiquité.

Le concept de miracle a toujours été profondément vague à mes yeux, mon athéisme rendant caduque la signification principale. Je considérais donc comme “miracle” un enchaînement hasardeux de causes à effets, avec intervention humaine au cours du mécanisme, influent et faussant ainsi l’attrait divin et sacré dudit événement. Il se trouve que j’ai depuis quelques mois une voix aussi poétique que désagréable dans le crâne, apparemment indépendante de ma volonté et dotée de pouvoirs. N’importe qui se serait mis à croire aux miracles et autres conneries, mais pas moi ! Stupide ? Si cela vous fait plaisir ! Non, assurément ce que je vis actuellement n’est pas un miracle, bien que cela ait été probablement causé par une action plus ou moins “divine”. Mais cela reste exceptionnel !

Je suis incapable de cesser de m’extasier devant une telle merveille, moi qui ai toujours rêvé de vivre au jour le jour, ne pensant qu’à la survie et la bonne santé de mes ouailles. Retourner à ma condition élémentaire de chasseur cueilleur. Laisser derrière moi toutes les préoccupations mineures qui parasitent et nous empoisonnent la vie moderne !

Me ressaisissant quelque peu, je regarde un homme solidement charpenté et m’apprête à aller lui proposer mon aide avant de me raviser : je ne connais absolument pas leur langage, nous ne pourrons pas nous comprendre aisément. Et le fait qu’ils pensent que nous sommes des dieux n’aidera pas mon entreprise, d’autant plus qu’ils refuseraient probablement toute aide de ma part par crainte du courroux. Je dois absolument trouver un moyen de converser avec eux !

HRP:

Enja continuait d'observer les villageois qui venaient et repartaient sans cesse. Ils travaillaient dur mais semblaient garder le sourire, elle admirait énormément cette simplicité de vie, ce bonheur même sous un dur labeur. Elle fut sortie de sa contemplation par le jeune homme avec qui elle parlait, ou plutot avec qui elle avait échangé quelques phrases depuis le matin. Il s'excusa puis se présenta :

- Je m’appelle Harry mais vous pouvez m’appeler Asulf et là, c’est Eithne. Je vous épargne l’énumération de ses titres, vous savez très bien de qui je veux parler et je ne souhaite pas la sortir de sa bouderie pour l’instant.

- En effet, je connais l'histoire, ou plutôt les histoires un peu troubles autour d'Eithne. Mère de tous et apparemment fille du chaos primordial.

Enja finit sa phrase en reconstituant mentalement l'arbre généalogique des dieux celtes. Le jeune homme commença à lui tendre la main puis se ravisa. Elle ne comprit pas vraiment pourquoi, mais ne fit aucune remarque pour ne pas le gêner. Elle remarqua aussi qu'il s'était présenté sans donner la discipline de ses études. Elle lui redemanderai probablement plus tard.

*Tu as déjà croisé Eithne ?*

*Je crois, il y a très longtemps. Mais nos possédés n'ont jamais vraiment parlé, nous savions juste que nous étions dans la tête de l'autre. Enfin, moi je savais. Elle, je ne sais pas.*

Enja tenta de rassembler dans sa tête d'autres informations sur la déesse, mais elle s'arrêta quand l'étudiant reprit la parole, en se tournant vers le ciel puis vers elle :

- Que pensez-vous de ce lieu et du point de vue qu’ont les habitants envers nous ? Quelles conséquences cela pourrait-il donc avoir sur leurs croyances et coutumes ? La question de notre incursion dans le temps n’est pas anodine, et pourtant l’euphorie de constater personnellement les fondations du monde dans lequel j’ai vu le jour est totale. Je ne souhaite qu’une chose : ôter ces loques et me vêtir d’époque puis leur prêter main forte, le seul soucis étant la langue. Si seulement j’avais hérité d’une divine d’ancienne Egypte.

- Il ne faut pas dire cela, tu vas froisser Eithne je pense ! Ce lieu, c'est une énorme occasion pour nous, de mon point de vue. J'ai l'impression d'avoir une chance incroyable d'être là, et de visiter ce village. Et j'ai l'impression que je ne suis pas la seule, souligna Enja avec un grand sourire. Pour les habitants, je suppose qu'ils ont des sentiments divers envers nous, un mélange d'admiration, de stupéfaction et de peur. Il faut les comprendre, nous sommes apparus soudainement, comme quelques dieux qu'ils vénèrent pourraient le faire... Le plus important maintenant, c'est de ne pas trop faire de vagues en marquant l'histoire d'une façon ou d'une autre, ça pourrait changer le futur, notre présent.

Enja terminait à peine sa phrase que le jeune homme se dirigea vers un petit garçon portant ce qui semblait être un vase canope. Malheureusement, à l'approche de l'étudiant, l'enfant prit peur et alla se cacher un peu plus loin. Le jeune homme semblait frustré et désolé de sa position :

- Pas étonnant qu’il ait pris peur, nous sommes des inconnus et ils ne savent même pas ce que nous sommes : humains ou créatures divines.

- Nous sommes les deux, même si ils ne le savent pas ! Et la différence de langue doit jouer aussi pour ce petit garçon. C'est d'autant plus effrayant.

Le barbu s'adressa au garçon en anglais, lui demandant de le conduire au temple du village, mais le garçon ne semblait pas vouloir bouger. Il ne comprenait surement pas un mot qui ne vienne de l'égyptien ancien. Enja se dit qu'elle pouvait aider le jeune homme, et chercha un adulte aux alentours. L'enfant était tellement apeurée qu'elle ne pourrait pas s'adresser à lui. Elle vit une femme, à quelques pas, qui parlait avec l'homme venu à leur rencontre le matin. Elle allait repartir mais Enja l'intercepta.

Parlant dans un égyptien sorti de ses souvenirs, assez hésitant, Enja demanda si il était possible d'aller voir le temple. Elle en mourrait d'envie, et le jeune homme semblait lui aussi être intéressé par l'édifice imposant situé un peu plus loin. La femme acquiesca mais la prévint qu'ils ne pourraient pas visiter quoi que ce soit dans leur tenue. En effet, la majorité du groupe issu du pensionnat était encore habillé des vetements de la veille, qui avaient subi moultes péripéties. Elle indiqua à Enja une maison, et l'informa que le groupe pourrait trouver de quoi s'habiller là-bas si ils en ressentait le besoin.

Enja la remercia chaudement, et repartit vers l'étudiant. Elle failli poser la main sur son épaule mais préféra parler un peu fort pour attirer son attention.

- Tu veux aller voir le temple ? lui demanda-t-elle.

Elle commença à se diriger vers l'endroit que la femme lui avait indiqué précédemment, et ajouta pour le jeune homme :

- Si tu veux y aller, il faut te changer. Apparemment il y a de quoi dans cette maison, là-bas.

Laissant le barbu à sa réflexion, Enja se dirigea vers la maison pour se changer. Elle entra par la petite alcôve qui servait de porte et découvrit une assez grande pièce carrée, avec , d'un côté, quelque chose qui ressemblait à un banc où étaient disposés une multitude d'habits. Ce devait être une sorte de maison commune où les femmes tissaient ou cousaient de quoi habiller le village entier. Enja regarda quelques robes, la plupart faites dans un tissu ressemblant énormément au lin que l'on peut trouver de nos jours. Elle en trouva finalement une à peu près à sa taille, après avoir vérifié que personne ne pouvait la voir, elle commença à enlever ses habits.  C'était une robe simple, de couleur beige, sans manche, et resserrée à la taille par une bande de tissu un peu plus foncée. Elle récupéra ses habits précédents, les plia et les rangea dans son sac à main avec le peu d'affaires qui lui restaient du voyage, puis ressortit pour se diriger vers le temple.

Qui suis-je ? Qui suis-je réellement au fond de moi et aux yeux des autres ? Une vie de reproche, de colère et de tristesse, inondée dans une solitude inavouée. Je connais mon passé mais mon présent est embrumé, je ne sais quoi penser de moi-même, perdu dans le néant que je suis. Autant dire que le futur m’est totalement inaccessible. Et si... ? Non, j’y penserai plus tard.

Mon oeil est attiré par des mouvements à ma droite aussi je détourne mon attention, jusqu’ici focalisée sur le jeune garçon, pour apercevoir le professeur qui se dirige à grands pas vers une locale. Je n’ai même pas le temps de me questionner sur la manière dont Enja va communiquer que je constate abasourdi qu’elles conversent en ancien égyptien.

”Lubricité over 9000 (18+)”:

Lorsqu’Enja ressortit de la petite maison, elle croisa l’étudiant, qui, apparemment intéressé par une visite du temple, souhaitait se changer à son tour. Sans qu’elle puisse en donner la raison, il semblait un peu rouge, troublé par quelque chose. Ne souhaitant pas le gêner comme elle avait pu le faire plus tôt, elle n’en fit pas la remarque.

Elle ne finit pas sa phrase. Le compliment, bien qu’évidemment agréable, ne mettait pas Enja particulièrement à l’aise. Le jeune homme rentra se changer et Enja commença doucement à marcher vers le temple, pieds nus dans le sable chaud. Elle ne tenait pas en place mais souhaitait malgré tout attendre l’étudiant. Revenue au niveau de la place où se tenait encore le groupe d’élèves du pensionnat, elle alla prévenir rapidement un de ses collègues de leur petite escapade vers le temple. Ainsi, au besoin, ils sauraient où aller la chercher. Elle allait tourner dans la rue qui menait au temple quand elle entendit quelqu’un la héler. Elle se retourna vers cette personne, qui n’était autre que le jeune homme, maintenant changé et ressorti de la maison :

Souhaitant lui répondre sans hausser la voix, Enja attendit qu’il marche un peu vers elle pour lui dire ce qu’il voulait savoir.

Au fur et à mesure de sa réponse, Enja observa l’étudiant, maintenant vêtu d’habits de l’Égypte Antique.

L’élève et la professeure maintenant réunis, ils se dirigèrent vers le temple. A quelques centaines de mètres du pied de l’édifice, Enja se figea, se rendant compte de son oubli.

Sans s’expliquer plus, et laissant l’élève en plan au milieu de la rue, elle se mit à courir vers la maison où ils s’étaient changés. Sur le chemin, elle releva légèrement sa robe après avoir plusieurs fois manqué de tomber en marchant sur le tissu. La sensation du sable sous ses pieds était agréable, elle donnait l'impression d'une immense liberté. Arrivée à la petite maison, elle entra et fouilla dans son sac à main qu’elle avait laissé là, dans un coin. Après quelques dizaines de secondes, elle finit par trouver ce qu’elle était venue chercher, et ressortit de la maison, une pomme dans chaque main. Elle revint vers l’étudiant sans courir, ses mains déjà prises ne pouvant pas relever la robe comme à l’aller. Lorsqu’elle fut de retour à ses côtés, Enja lui tendit un des fruits.

Enja reprit sa marche vers le temple, qui commençait fortement à ressembler à un pélerinage. Elle avait déjà vu plusieurs édifices semblables, lors de ses voyages en Égypte, mais tous avaient subi les ravages du temps et l’érosion dues aux éléments.
En arrivant au pied du temple, Enja crut que son cœur allait lâcher. Ses jambes faillirent se dérober sous son corps, tant le temple était magnifique et que cela la touchait au plus profond d'elle-même. Il était bien plus beau que n'importe lequel qu’elle avait vu ou visité avant. Quelques marches menaient à l’entrée, et de chaque côté de la grande porte de l’entrée principale se trouvaient deux énormes statues. Enja reconnut immédiatement le dieu représenté. Cette tête animale, mélange chimérique d’un termitivore et d’une sorte de chien ne pouvait appartenir qu’à Seth, aussi appelé Setesh selon les traductions. Sans donner d’indice sur son identité, Enja se tourna vers l’élève, et lui demanda en montrant les statues :

Continuant à observer le temple, elle commença l’ascension de la dizaine de marches qui se dressaient devant elle. Avant de se tourner vers la porte d’entrée, elle scruta les côtés de la porte, totalement remplies d’inscriptions en hiéroglyphes. De ce qu’elle pensait comprendre, Enja put déduire qu’il s’agissait de la présentation du dieu et de quelques-uns de ses traits particuliers. Elle passa ses mains dessus, profitant du relief de ces inscriptions qui, sûrement au contraire de celles à l’intérieur, n’étaient pas peintes mais gravées.
Idunn, bien que totalement d’une autre partie du globe et d’une mythologie toute autre, ne disait presque rien, tant elle était captivée et admirative du bâtiment qui se présentait. Enja se dit, encore une fois, qu’Idunn l’avait bien choisie, tant elles semblaient ressentir les mêmes choses.
Enja reposa son regard vers l’imposante porte d’entrée du temple. Elle s’étonna de ne pas voir de gardes la surveiller, mais jugea que la taille du village ne justifiait sûrement pas une telle sécurité. Elle allait passer la porte, mais se tourna vers l’élève, qu’elle avait délaissé quelques minutes auparavant, et l’observa pour savoir si il semblait la suivre ou non.

Je cours, que dis-je, je vole ! Je me sens pousser des ailes tandis que mes pieds foulent le sol sablonneux, pressé que je suis de rattraper mon professeur pour enfin nous rendre dans ce fameux temple. Elle marche au ralenti, probablement qu’elle m’attend et cette attention me touche particulièrement, cette jeune femme a beaucoup de coeur !

HRP:

L'étudiant décida d'entrer dans le temple. Il monta les marches, et poussa sans aucune hésitation les deux grandes portes d'entrées. Tout comme Enja, il semblait fasciné par ce qui l'entourait. Il prononça à voix haute quelques phrases en l'honneur de Seth :

- Ô Seth, seigneur des orages et du tonnerre,
Nous venons t'honorer après ces millénaires
D'abandon honteux que tu as subi,
Bien quand dans les faits tu sois encore béni.

Le jeune homme entra, un pied à la fois, sous les yeux d'Enja qui n'osait pas encore avancer. Celle-ci observait, encore indécise sur le comportement à avoir. Idunn ne parlait pas plus, ne se sentant pas totalement à l'aide dans un temple d'une mythologie lointaine. Enja put noter de l'extérieur quelques détails caractéristiques de temples égyptiens de cette époque. La pièce sur laquelle les portes s'ouvraient était une cour, à demi-ouverte dur le ciel, et pleine de colonnes magnifiquement décorées de symboles mythologiques. En face des première portes, se trouvaient d'autre portes, qui menaient surement à d'autre pièces plus fermées mais aussi plus petites et plus sacrées.

L'élève invita Enja à entrer :

- Venez professeur, entrez. Notre cher hôte ne semble pas considérer notre entrée en ce lieu comme une faute. Autant en profiter ma foi, s'en mettre plein les yeux et admirer avant que le temps ne reprenne ses droits !

Bien que d'accord, Enja avait du mal à agir. Elle se sentait hésitante, accusant le choc de tant d'informations et de découvertes en même temps. Elle se décida à faire un pas, franchissant la ligne qui marque l'intérieur du temple. Un mélange de sentiments s'empara d'elle, et cette fois elle ne put se retenir de tomber à genoux. Enja essaya de les retenir au maximum, mais quelques larmes de joie coulèrent tout de même. Les essuyant prestemment pour éviter que l'étudiant ne les voie, elle se releva. Elle se reprit, et décida de trouver l'endroit où elle pourrait faire l'offrande de la pomme qu'elle avait été rechercher quelques dizaines de minutes auparavant.

Elle ferma les yeux, et fit une prière silencieuse à Seth. Enja avait toujours eu du mal avec ce qu'elle pouvait penser de Seth. Les mythes le concernant étaient très négatifs, mais elle savait bien que chez tout dieu se trouvaient des côtés bons comme mauvais. Les mythes finissaient toujours par ne pas être totalement objectifs.

**Seth, toi qui n'a jamais été clair dans mon esprit, toi que j'ai toujours eu du mal à cerner, montre-moi où je peux t'honorer en te donnant l'offrande que j'ai apporté.**

Comme une réponse intérieure, un signe silencieux, Enja sentit qu'une sorte d'autel placé du côté droit de la salle l'appelait. La table, en pierre, pouvait faire prenser aux autels religieux modernes. Plusieurs statues et amulettes y étaient dispersés, confirmant le culte de Seth en ces lieux. Elle s'en approcha, et déposa sa pomme au milieu, dans une sorte de récipent en argent. Elle sentit passer à travers elle le caractère sacré du geste pourtant simple qu'elle venait de faire. Respirant un grand coup afin de reprendre ses esprits, Enja retourna vers l'étudiant, et l'invita à l'imiter en déposant son offrande sur l'autel. Il devait surement y en avoir de plus grands à l'intérieur, mais en tant qu'invités du village, ils ne pouvaient pas se permettre, et particulièrement le premier jour, d'aller si loin en territoire sacré.

Les deux membres finirent néanmoins par visiter cette grande salle , explorant chaque recoin de la cour. Inspectant chaque statue, chaque colonne, Enja ne lésinait pas sur les explications, et cela ne semblait pas gêner le jeune homme. Elle commentait les représentations de Seth, les figures des autres dieux qui étaient dessinés ou gravés sur les murs, et tous les symboles mythologiques qu'ils pouvaient croiser tels que les formes d'amulettes qui se répétaient. Ils passèrent une bonne partie de la fin de la journée à errer dans ce lieu, profitant du spectacle qui s'offraient à eux.

Enja proposa au jeune homme de finir leur découverte pour la journée, et de revenir plus tard si leurs activités le permettaient. L'étudiant sembla d'accord, et ils ressortirent du bâtiment, se promettant qu'ils ne manqueraient pas de revenir. Il revenaient vers le centre du village lorsque le jeune homme, un peu hésitant, demanda à Enja si elle accepterait de choisir les mêmes hôtes que lui. En effet, il lui rappela qu'il ne parlait pas l'égyptien, mais souhaitait l'apprendre.

Enja n'eut pas longtemps à hésiter : ce jeune homme semblait très intéressé par la mythologie, et avide d'apprendre la langue de l'époque des pharaons. Peut-être même serait-il intéressé pour l'assister à son poste de professeur, ce qui ne serait pas de trop si elle finissait par enseigner à l'université en plus du lycée. Elle accepta donc, et ils trouvèrent dans la journée de charmants hôtes, une famille de 3 personnes, chez qui loger pendant les quelques jours où ils resteraient au village.