L'amitié n'était-elle pas une forme de la musique ?

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On aurait pu dire un jour comme les autres, une fois de plus, mais ce n'en était rien. Set était étrangement... Heureux ? Enfin si on pouvait le qualifier d'heureux en voyant cette expression si blasée qui était sienne. Il était légèrement usé. Une sacrée journée. Il avait bossé tard au bar, et avait directement enchaîné avec les cours au pensionnat ainsi qu'une bonne grosse dose de révisions. Sans compter la fatigue passagère qui s'accumulait et les "crises" avec son p'tit paratonnerre adoré, qui se faisait drôlement agaçant en ce moment. Il avait ces règles ou quoi ? Oh, pardon, c'est un homme, oups. Certes, le Dieu lui foutait une pression ignoble avec sa prétention sans fin, pour qu'il soit le meilleur. Et c'est ce qu'il faisait, mais pas assez pour le paratonnerre gueulard. Il se devait d'être le meilleur, pas par orgueil contrairement à certains, uniquement pour son jeune frère; qui l'attendait à 1800 km par-delà, en Suède. Alors pourquoi serait-il content ? Tout simplement parce qu'aujourd'hui, OUI, aujourd'hui, il reçoit ce pour quoi il avait énormément économisé. Ce pour quoi il s'était tué à la tâche au bar, à faire le double d'heures, quand bien même 99,9% étaient pour son frère. Il était donc en route, pour passer récupérer ce quelque chose, livré pas très loin du pensionnat, dans Galway, là où il bossait aussi. Il n'avait pas souhaité le faire livré au pensionnat même, aucune confiance. Peur de se faire abîmer ou massacrer, ou bien... Enfin peur que tout ce qui peut être mauvais pour sa précieuse commande arrive au pensionnat. Il avait donc fait livré dans une petite poste sympa, ou le soin des colis était respecté.


Il arrivait donc, un pas calme, qui trahissait son engouement à l'idée d'avoir son colis. Il était tel un enfant, impatient d'ouvrir son cadeau sous un sapin de Noël. C'était plutôt rare de le voir ainsi. S'engouffrant dans la petite entrée, Set salua le personnel avant de tendre sa carte et le papier stipulant le numéro de commande. Si on observait bien, pendant que le postier s'agitait à chercher son colis, Set abordait un très léger sourire, si rare sur son visage. Un colis, pas énormément grand mais tout de même assez imposant et sacrément bien protégé se plaça sur le comptoir. Le saisissant avec une extrême délicatesse, le suédois tourna les talons, remerciant le personnel avant de sortir du bâtiment. L'air se faisait frai, et un léger vent lui caressait les joues, le suédois était vraiment posé, apaisé.

"C'est ce paquet qui te rends si positif, mortel ?"
Oh, le paratonnerre se réveillait tien ? Il avait été bien silencieux depuis cette journée. Peut-être était-il lui aussi usé de ces petites gueguerres incessantes avec le violacé ? Set se contenta de répondre par un hochement de tête, regardant le colis à chaque pas, visiblement impatient de l'ouvrir. Il affichait maintenant clairement un timide sourire, arrivant bientôt devant le pensionnat. Collant un peu plus le colis contre lui, il rentra, regardant autour de lui. Une fin de journée, bien calme ? Fallait croire. Set n'avait guère regardé l'heure et s'était tout bonnement contenté de foncer chercher son précieux colis.

Une fois dans le pensionnat, le suédois pris l'initiative de passer par sa chambre afin de prendre de quoi ouvrir son colis. Oui, prendre. Il ne comptait pas, pour une fois, rester isolé dans sa chambre. Il avait une toute autre idée en tête. Une fois le tout pris, il se dépêcha de descendre les marches à grandes enjambées, de plus en plus enjoué, même si son visage, comme à son habitude ne laissait rien paraître, excepté une sorte de sourire. Un soupir du dieu, qui se faisait nerveux. Le jeune homme le ressentait un peu, comme s'il il se prenait des minuscules décharges à chaque mouvements. Agacé, il lâcha d'un ton renfrogné au dieu.

"Tu vas bientôt le savoir ce que c'est, paratonnerre. T'es pas censé pouvoir lire dans mon esprit ? Bref, nous y voilà. Cela répond-il à ta question ?"
Il était devant l’équivalent d'un auditorium, entouré d'instruments de musique. Une pièce adorée par le suédois, qui venait souvent s'isoler dedans le soir, à ses heures perdues. Il monta les petites marches menant à la scène. On aurait dit une pièce digne d'un conservatoire, tout ce qu'il lui fallait. Il posait soigneusement son colis, avant de l'ouvrir tout aussi doucement, en sortant une mallette rectangulaire en cuir dur, assez solide, avec de belles finitions. Set l'ouvrait, laissant apparaître un violon à l'intérieur.


"C'est donc ça, un violon ?"

Le dieu s'offusquait de tant d'attente pour, selon lui, si peu de chose. Le suédois soupira d'un ton sévère faisant comprendre au dieu qu'il ferait mieux de la boucler s'il voulait pas qu'il lui hurle dessus. Ce n'était pas n'importe quel violon. Ce petit bijou était un modèle unique, fait par un luthier français, venant du sud de la France. Le bois était d'une magnifique couleur, très clair, comme si le violon était naturellement blanc. En même temps de l'érable de cette qualité...  Le vernis, qui le recouvrait, lui donnait une brillance et une apparence des plus magnifiques, et était spécialement coonçu pour embellir le son de cette œuvre. Quant au manche, la tête, la mentonnière, tout était d'un excellente, même extrême qualité. Du matériel de professionnel. Un violon digne d'un solo. En même temps, le suédois en pratiquait depuis l'âge de ses 8 ans. Il en avait aujourd'hui 18, et c'était décidé à s'offrir ce bijou pour une somme de 2600 euros. Cher, il vous l'accorde. Mais pour une telle qualité, c'était le prix à mettre. C'était un peu sa récompense pour avoir bossé tant. Même si avec son héritage familiale, il aurait pu s'en prendre des tonnes, il préférait se l'offrir à sa sueur, à lui.


Posant son menton sur la mentonnière, Set se saisit de son archet, le passa délicatement sur chaque corde. Un son chaud, puissant qui emplissait chaque coin de la pièce. Il avait payé un petit plus, pour que le violon soit réglé selon le moindre de ses souhaits. Et ça correspondait parfaitement. Il commença donc "sa danse" sur les touches, alternant différents accords, puis mélodies. Le son variait entre chaud, puissant, à quelque chose de plus cristallin, sombre. Une telle profondeur. Le violacé était aux anges, et se lâchait, décidant de se lancer dans des morceaux plus complexes.

"Cesses-donc cela, mortel ! C'est insupportable !"
Une violente décharge, forçant Set à agripper violemment son violon pour ne pas le lâcher parterre. Comment osait-il, cet ectoplasme divin, là ?! Set se mordait les lèvres pour ne pas hurler contre le Dieu qui avait bien failli réussir à massacrer une telle pièce. Soupirant pour évacuer sa colère passagère, il posa de nouveau l'archet sur les cordes, et repris sa pose.

"Si tu veux jouer ainsi, Thor, tu vas être servi."
Un ton glacial, le dieu aura qu'à le tuer, s'il veut qu'il cesse de jouer, point barre. Fermant les yeux, Set se laissa guider par la mélodie, jouant un de ses morceaux favoris, tellement célèbre. Qui ne connait pas le fameux Requiem For A Dream de Clint Mansell, hein ?

Celui qui observait Set, le connaissait sûrement, non ?

La musique est une fenêtre par laquelle on s'évade

Sonata pour une amitié

""

Journée longue et éprouvante. Aucun élément n’était venu entacher la belle harmonie de notre duo, mais nous étions à bout, moi physiquement, lui mentalement. Les cours s’étaient enchaînés, aussi inintéressants les uns que les autres, et l’approche des vacances tant attendues se faisait sentir douloureusement à mesure que les secondes passaient, aussi lentes que des heures. J’avais le lourd sentiment de n’avoir rien tiré de positif de ma journée, de n’avoir été qu’un mouton qui suivait le système scolaire en s’y plongeant corps et âme, d’avoir oublié d’être moi le temps d’une journée. Le cœur gros, j’arpentais les couloirs aux intercours, profitant des quelques minutes de répit pour profiter de mon tête à tête avec Loki, qui restait persuadé qu’Odin, Père de toute chose, n’aurait jamais voulu créer de cours aussi ennuyeux.

Bref passage aux toilettes après un cours d’histoire. Appuyé sur le lavabo, me rafraîchissant le cou et les mains, je sentis mon cœur s’arrêter quand je relevai la tête pour voir un visage inconnu devant la glace. Reprenant mes esprits après une fraction de seconde, je me souvins m’être teint les cheveux en grimaçant, après avoir perdu un pari stupide. Le roux ne m’allait décidément pas, me dis-je en ne rigolant qu’à moitié. Combien de temps avant de pouvoir me les décolorer de nouveau, déjà ? Une semaine ? Je fis la moue en me promettant de rattraper tout ça dès notre prochaine après-midi libre.

A la fin de mon dernier cours, une option facultative qui m’avait largement fait regretter mon ambition, l’heure du déjeuner était annoncée depuis déjà presque une heure. Mais j’étais fatigué, las et en quête de sentiments créateurs, aussi passais-je en vitesse chercher de quoi me faire un sandwich et je repartis hors du bâtiment principal, non sans avoir avalé un bon demi-litre d’eau fraîche pour me revigorer. Je n’avais pas envie de rejoindre mes amis de M, car ils ne savaient que parler de cours, de professeurs et des examens proches.

Après quelques minutes à traverser la cour joliment arrangée, j’entrai avec prudence dans le local de musique. C’était mon club, là où je me sentais le mieux, chez moi, entouré de mes proches. Tous les musiciens qui en faisaient partie étaient comme mes cousins, ici, et je me plaisais à passer du temps avec eux.

Le local était constitué de deux salles séparées par le petit hall d’entrée. La première, minuscule, contenait tous les instruments trop grands pour être déplacés, comme un piano, une batterie, et, emballée dans une housse noire impeccable, ma harpe. On y trouvait aussi des pupitres et des sièges supplémentaires. La deuxième, largement plus grande, était la salle de vie. Disposée comme un petit amphithéâtre, c’était là que tout le monde se retrouvait. Il y avait même un petit frigo rempli de canettes de soda, des gâteaux si quelqu’un avait la générosité d’en apporter, et une machine à dosettes café/thé trônait sur un guéridon.

J’étais dans le hall, tirant la clé de la petite salle de ma poche pour chercher ma harpe, mon exutoire. Toutefois, mon geste s’arrêta net alors qu’une musique atrocement familière mais magnifiquement interprétée passa à hauteur de mes oreilles.
« Eh, c’est la musique du film où tu as pleuré comme une madeleine pendant des heures après la fin ! »
« Ouais, peut-être, mais tu n’étais pas non plus dans ton assiette, je te rappelle. Et avec mon passé, j’ai le droit d’être plus sensible que les autres à ce sujet. »
« Tu parles, tu pleurais presque uniquement parce que Marion se prostituait et qu’elle n’était plus qu’à Harry. Remarque, ça t’arrangeait bien, tu avais un crush sur lui ! »
Je riais silencieusement alors que j’entendais Loki faire un effort pour parler comme les jeunes. C’était tellement bizarre !

Je déballai discrètement ma harpe et la fis rouler jusqu’à la grande salle. Le garçon était de dos et ne m’avait ni vu ni entendu. Pour ma part, je n’arrivais pas à l’identifier, mais je voyais son violon et ne pus m’empêcher d’écarquiller les yeux en l'observant. J’avais une piètre connaissance de cet instrument, mais c’était visiblement une pièce magnifique, qui avait dû lui coûter très cher. Je me demandai où il avait pu se procurer tant d’argent. Etait-il encore un autre de ces fils à papa qui obtenaient tout ce qu’ils voulaient en claquant des doigts ? A entendre la mélodie terriblement triste, j’avais étrangement le sentiment que ce n’était pas le cas.

J’attendis patiemment qu’il termine son morceau pour jouer ma propre interprétation. La musique vaut bien plus que des paroles, et constituait un excellent moyen de briser la glace.

L'amitié n'était-elle pas une forme de la musique ?

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"Il semblerait que tu ne sois plus seul, mortel."

A ces paroles du Dieu, Set venait d'achever une partie de son interprétation, laissant une autre mélodie, toute aussi remplie d'émotion et magnifiquement bien jouée, prendre place. Le suédois, curieux pour une fois de savoir de qui une telle mélodie pouvait émaner, tourna les talons. Il afficha dès lors une tête dubitative, levant un sourcil, surpris de la gueule du musicien. Pas qu'il n'aime pas le roux, loin de là, mais là... C'était une immense faute de mauvais goût du gars en question. Déjà qu'il semblait assez enfantin de visage... Alors avec ce roux plus ou moins immonde, devinez quoi. Ou alors, Set se faisait-il trop vieux ? Il se découvrait un côté styliste, ma chériiiiiie, c'est magnifaïïïïïque ! On aura tout vu, tss.


Ne disant pas un mot de plus, le blasé se contenta d'observer le roux qui continuait son récital à la harpe. La harpe, bel instrument, vous dira-t-il. Il avait juste quelque connaissances en ce domaine, mais n'était guère harpiste. Il adorait juste le son de cet instrument, et toutes les possibilités que celui-ci pouvait offrir. Et le jeune homme roux savait parfaitement en jouer. Quand c'était-il installé ?
"Pendant que tu jouais de cette horreur, mortel ?"

Question coquebine, il le savait. On pouvait sentir le regard irrité et l'aura lourde du dieu se poser sur les épaules du suédois. Le parathornerre n'avait juste pas apprécié ne serait-ce qu'une note, une infime part de son interprétation. Le violon était comme un instrument de torture aux oreilles de l'asgardien. Et là, quelque chose lui disait que avec l'harpiste roux, son supplice ne faisait que commencer. A cette douce pensée, Set afficha un léger sourire amusé. Pour une fois qu'il n'est pas le seul à faire fulminer le petit paratonnerre. Bon, souci c'est que celui-ci rageait tellement que le blasé en sentait de légères décharges dans tout le corps. Que c'est agréable de vivre avec un pilonne électrique, j'vous jure.


Les notes s'enchaînaient, toutes aussi bien effectuées, mélodieuses, et bourrées d'émotions. Set ne pu s'empêcher d'avoir un léger, même si un minuuuuuscule, serait plus juste; pincement au coeur. A faire croire que le rouquin l'avait vécue, cette mélodie. On interprète toujours mieux ce que l'on a vécu, n'est-ce-pas ? Il est vrai que pour le violacé; il y avait une partie de véridique dans ces dires. Il avait maintenant posé ses pupilles vertes sur la harpe du jeune homme, cherchant à "étudier" l'instrument de celui-ci. Un son si... personnel et enivrant était rare. Même son instrument en devenait "personnel", à la façon dont il jouait la mélodie. Mettez le même instrument dans les mains d'un aussi bon musicien que lui, ça sera complètement différent. On sentait bien que le roux avait besoin de fuir son quotidien sûrement casse-pied du pensionnat. Un exutoire, pour lui aussi, la musique ?
"Et une torture pour moi, Set. Quitte cette pièce, je te prie."

Attendez... quoi ? Le paratonnerre se faisait mignon... et... et... agréable avec lui ?! Il pouffa de rire sur le coup, n'en revenant pas que, lui, le grand, le puissant, le plus beau des Dieux asgardiens; lui demande ceci ?! C’est que ça devait vraiment être un supplice pour lui ! Lâchant un soupir avant de regarder le rouquin qui avait fini à son tour sa mélodie, Set murmura d'un ton froid à l'intention du Dieu :
"T'as aucune oreille musicale, mon vieux paratonnerre. Je ne bougerais pas d'ici, c'est mon moment détente, vois-tu ?"

Une violente décharge faisant sursauter le suédois, comme s'il venait de se prendre un seau d'eau glaciale sur la tête. Puis la voix puissante, irrité du dieu.
"Tu oses encore me dire non, misérable mortel ?! Alors que moi, Thor, je me suis abaissé à te demander ceci "poliment", comme vous diriez, vous humains ?!"


Set se contenta seulement de baisser la tête, légèrement secoué et sonné. Le dieu aurait forcé plus, il aurait pu se retrouver étalé parterre, inconscient. Il le savait, qu'un beau jour Thor le fichera parterre, si ce n'est pas sa p'tite Liev'. Au lieu de répondre au Dieu comme il avait l'habitude de faire sur un ton encore plus provocateur, Set avait tout bonnement serré son violon, seul objet de ses pensées. Il venait d'acquérir ce bijou il y maintenant une bonne heure, il n'allait pas laisser le Dieu massacrer des heures et des mois de galère parce que, môsieur le paratonnerre avait décidé d'avoir aucune culture musicale. Lâchant un second soupir bien plus expressif que le précédent, démontrant un agacement certain de la part de violacé, il dédaigna jeter un rapide regard en biais au roux, tentant de lui faire comprendre que s'il posait une question sur son étrange attitude la minute là, il finirait avec une harpe bien placé où il faut, vous voyez ?

"Superbe interprétation. Longtemps que tu joues ?"
Froid, stoïque, blasé, Set tout craché. Même si l’œuvre du jeune roux l'avait clairement "émoustillé", il n'en montrait pas moins que dalle, comme d'hab'.

"Et je vais devancer les questions stupides que l'on se posent tous, c'est Set. Et toi, tu te nommes ?"
Pas forcément méchant, mais pas gentil non plus. Il était dur à croire, mais le roux avait une chance de tomber sur un Set assez bien luné malgré les petits inconvénients engendrés par la mauvaise volonté du paratonnerre.
Qui sait, peut-être qu'avec un peu de chance, et un paratonnerre pas trop chiant, Set trouvera un "collègue" musicien en la personne de ce jeune homme roux.