La journée s’était finalement écoulée. Numa s’était rendue près du bassin à carpes et regardait inlassablement les poissons nager. Ils avaient de très belles couleurs et leurs petites nageoires étaient adorables. Leurs ondulations calmes et harmonieuses étaient apaisantes. La demoiselle soupira, son souffle chaud se transforma en fumée blanchâtre et s’envola doucement vers le ciel grisé par le froid.
Même si son corps se refroidissait, elle ne voulait pas bouger d’ici, comme envouter par le mouvement gracieux des habitants de ce bassin.

*Ne t’endors pas non plus.*

L’intervention de l’esprit du chien réveilla instantanément la jeune fille. Non pas qu’elle allait vraiment s’endormir, mais elle était trop bien plonger dans ses pensées. Elle en avait même oublié son compagnon omniprésent, pour ainsi dire.
Frustré, ce dernier pesta.

*Je ne vois pas en quoi des poissons peuvent être passionnants.*
*Il y a des choses que les divinités ne peuvent comprendre, je présume.*
*Explique moi et je comprendrais.*

Expliquer ? Ce n’était pas évident.
Numa s’approcha du bassin et posa doucement son doigt dans l’eau. Tous les poissons s’enfuir en s’éparpillent dans le bassin, loin du corps inconnu qui venait de pénétrer dans leur territoire.

*Tu vois en chaque être humain quelque chose de beau et fascinant. Moi je vois en général de la noirceur et de la laideur. Cependant, lorsque je regarde les animaux et la nature, c’est cela que je trouve beau et fascinant. Ils ne jugent pas. Ils ne connaissent ni la haine, ni la méchanceté.*

Numa ne retira pas son doigt et regarda une carpe venir à elle, inspectant l’étrangeté qu’il avait en face de lui, avant de s’en retourner à ses activités.
L’esprit du chien compris rapidement ce que voulait dire son hôte, après tout, il avait accès à ses souvenirs et son esprit. Même s’il n’était pas forcement d’accord avec son hôte, il comprenait et respectait sa vision du monde.
Numa retira son doigt, et de nouveau, tous les poissons s’écartèrent. La demoiselle se releva et leva les yeux vers le ciel. Même gris il était si beau. Le froid ne pouvait pas empêcher la grande rêveuse qu’elle était d’admirer les étoiles la nuit, ni les nuages blanchâtre du matin.
Après un moment de contemplation, Numa commença à se retirer. Elle mit sa capuche à fourrure et enfouie ses mains gelées dans ses poches et regarda le sol, une nouvelle fois perdue loin dans ses songes.

Tant et si bien qu’elle ne vit pas la personne en face d’elle, et même si sa marche était lente et calme, elle percuta doucement l’inconnu.
Sorti spontanément de sa rêverie, elle recula vivement d’un pas et leva la tête vers la personne qui n’avait rien demandé.

_Excusez moi. Je ne vous avez pas vu.

Lorsque cette personne lui porta son attention, Numa pencha légèrement la tête sur le coté, toujours le visage fermé d’expression.
C’était une demoiselle. Et elle lui disait vraiment quelque chose.
Elle était incontestablement jolie avec ses cheveux clairs qui encadraient son visage pâle. Elle aussi avait une mèche sur son œil droit. Mais Numa doutait qu’elle le cache pour les mêmes raison qu’elle. L'inconnue était plus grande que la française et il était certain qu’elle soit son aînée puise qu'elle ne l'avait jamais vu en seconde.
La vision de cette fille lui revint comme un boomerang sur la figure. Eternellement inexpressive, Numa s’exprima tout de même de sa voix calme et douce, mais sans réfléchir et avec beaucoup de naïveté pour le coup :

_Vous ne seriez pas l’ange ?